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Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur | AERES

La Communication Numérique demain ?

La Communication Numérique demain ?

Quels métiers, Quelles compétences, Quels managements, Quelles organisations du travail et quelles formations ?

le 18 mai 2011 à l’ESSEC à La Défense

APPEL A COMMUNICATIONS

Face aux évolutions technologiques, les professionnels de la communication sont en train de vivre de grandes mutations qui rendent peu visibles les réalités actuelles et surtout à venir des métiers dits du numérique.

L’internet et les technologies de l’information modifient radicalement les activités des métiers de la publicité et de la communication. Dans la pratique, une même personne peut exercer simultanément plusieurs métiers. Ainsi, l’auteur d’un projet peut être en même temps le scénariste et le concepteur de l’œuvre. Le concepteur graphique peut également être le directeur artistique ou un infographiste. Ou encore, le rôle de modérateur-animateur multimédia peut aussi être confié à un webmaster ou à un community manager. Cependant, les entreprises peinent parfois à trouver dans ces domaines les compétences qui leur sont nécessaires pour se développer. Les métiers de la communication numérique et le management des organisations évoluent très vite et le regard prospectif sur ces mutations, ruptures, signaux faibles semble indispensable pour éclairer l’action présente des acteurs du secteur.

De plus, la communication numérique vient de plus en plus bouleverser les réalités professionnelles de toutes les fonctions : finances, marketing, logistique, RH, etc. Lors de ce colloque, nous pourrons débattre des impacts, des enjeux, de la communication numérique sur ces fonctions et métiers. Suite à une étude de prospective des métiers de la communication numérique, ce colloque permettra également d’en présenter les résultats mais également de réunir chercheurs et praticiens qui s’intéressent à l’impact du numérique sur la Communication en général.

Nous serons particulièrement attentifs aux travaux de recherche interdisciplinaires ou aux notes de praticiens sur les thèmes suivants :

Les métiers et les compétences de la communication numérique – Les tendances d’évolution de la communication numérique – Les organisations du travail et le numérique – Les formations en communication numérique – Les stratégies numériques – Les enjeux de la communication numérique – Les avancées technologies – La création et le numérique ? – La sécurité numérique et l’intelligence économique – Evolution des pratiques RH 2.0 – Nouveaux comportements au travail et communication numérique – Approche et comparaison internationale de la communication numérique – Emergence de nouvelles fonctions professionnelles et intégration dans la gamme des métiers – Les processus créatifs mobilisés
(hybridations, créations, filiations, transformations…) – Les stratégies d’acteurs utilisées pour forger leurs missions et leurs représentations sociales – L’investissement symbolique dans les nouveaux métiers, les médiations et représentations qui en découlent – L’émergence de nouveaux métiers et leurs impacts en termes de création d’entreprise – Etc.

Les meilleures communications feront l’objet de publications dans la revue Management&Avenir, revue classée CNRS, AERES et ESSEC et d’un ouvrage aux éditions EMS.


Comité Scientifique

Sous la direction scientifique de
Luc Boyer (Université Paris Dauphine), Aline
Scouarnec
(Université de Caen (Nimec), ESSEC)
Maria-Mercanti Guérin (Cnam) et Sébastien
Payre
(Université de Caen, Nimec)

Olivier Badot – ESCP Europe, IAE de Caen, Nimec, Christine Balagué – Institut Telecom – TEM, Isabelle Barth – Ecole
de Management de Strasbourg, HuManiS,  Bertrand Belvaux – Université Paris II Panthéon Assas, Largepa,  Christophe Benavent – Université de Paris Ouest Nanterre la Défense, Ceros, Florence Benoit-Moreau – Université de Paris Dauphine, DRM, Michèle Bergadaà – Université de Genève, Suisse, Marc Bonnet – Université Jean Moulin Lyon 3, Iseor, Frank Bournois – Université de Paris II, Ciffop, Joël Brée – Université de Caen, Nimec, Rouen Business School, Etienne Candel – Université de Paris IV Sorbonne, Celsa, Aude d’Andria – Université d’Evry-Val-d’Essonne, Eva Delacroix – Université de Paris Dauphine, DRM, Christine De Valck – HECParis, Pierre-Louis Dubois – Université de Paris II, Ciffop, Jean-Yves Duyck – Université de La Rochelle, Marc Filser – Université de Bourgogne, Laurent Flores – Université Paris II Panthéon Assas, Largepa, Matthew Fraser – AmericanUniversity of Paris, Stéphanie Hérault – Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, Prism, Valérie Jeanne-Perrier – Université de Paris IV Celsa Paris-Sorbonne, Gripic, Julien Levy – HECParis, Maria Mercanti-Guérin – Cnam Paris, Jean-François Lemoine – Université de Paris I, Valérie Patrin-Leclère – Université de Paris IV Celsa Paris-Sorbonne, Gripic, Laure Poulain – Gobelins, Philippe Robert-Demontrond – Université de Rennes 1, Monika Siejka – Institut International du Multimédia, Sébastien Payre – Université de Caen, Nimec, François Silva – ESCEM,Cnam
Paris,MauriceThévenet – Cnam Paris, ESSEC

Calendrier  et adresse de contact :

Toute communication est à adresser
à :
comnumerique2011@prospectivedesmetiers.com

Remise des intentions : 25 février 2011

1 page de présentation du projet de communication

Acceptation des intentions : 1°mars 2011

Remise des communications : 30 mars 2011

Texte de 15 pages maximum aux normes de Management&Avenir

Retour des évaluateurs : 20 avril 2011


Recommandations aux auteurs pour les communications des chercheurs

Les communications auront une longueur maximum de 12 à 15 pages (maximum), en simple interligne. Les manuscrits comportent un bref résumé en français et en anglais de 400 signes maximum, ainsi que les mots-clés pour chaque résumé (titre également traduit).

Le nom de l’auteur et sa courte présentation, son appartenance institutionnelle, son e-mail et l’adresse complète doivent figurer uniquement en page de garde. Les articles ne doivent pas comporter d’annexes : tableaux, schémas, images et autres ajouts (en noir et blanc) sont insérés dans le texte. Les parties suivent une numérotation simple : 1., 1.1., 1.1.1., etc.

Titre : times 18 en gras

Nom de l’auteur : times 14 en gras

Résumé et Abstract en gras en 16, puis contenu en times 12

Titre 1. : Times 14 en gras

Titres 1.1. : Times 12 en gras

Conclusion : Times 14 en gras

Bibliographie : Times 14 en gras, puis contenu en times 12, suivant le modèle suivant :

Ouvrage : nom de l’auteur et initiale du prénom, date de publication, Titre de l’ouvrage, Editeur, Lieu d’édition, (exemple : Mintzberg H. (1994), Grandeur et décadence de la planification stratégique, Dunod, Paris).

Article : nom de l’auteur et initiale du prénom, date de publication « Titre de l’article », Titre de la revue, Vol. x, No. x, p. x-y, date de publication (exemple : Koenig G. (1996), « Karl E. Weick », Revue française de gestion, No. 108, p. 57-70, mars-avril-mai).

Les titres, intertitres, « chapeaux » et textes en exergue sont de la responsabilité du comité scientifique
qui se réserve le droit de modifier ceux qui sont proposés par l’auteur.

Recommandations aux auteurs pour les notes des praticiens

Les notes des praticiens auront une longueur de 3 à 10 pages présentant une expérience terrain et suivront les mêmes règles de mise en forme que les communications de chercheurs.


Information sur les sites ou blog :
http://www.metiers-publicite.fr

Rapport intégral : Autonomie budgétaire et financière des universités

En dépit du manque d’indicateurs de l’insertion professionnelle en université et dans un cadre universitaire où « Les critères de l’AERES l’emportent pour le moment sur ceux de l’insertion professionnelle », comme la regretté un enseignant de l’université d’Evry lors de la présentation le 15 juillet 2009 au Sénat, nous décidons de reprendre intégralement le rapport sur l’Autonomie budgétaire et financière des universités et nouveau système d’allocation des moyens (sympa) pour verser cette pièce au débat.

Mission de contrôle commune à la commission des finances et à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication

Rapport d’information de
MM. Philippe ADNOT (NI – Aube) et Jean-Léonce DUPONT (UC – Calvados)

Rapport n°532 (2008-2009) présenté sous l’intitulé

Autonomie budgétaire et financière des universités et nouveau système d’allocation des moyens
(sympa) : le chemin de la vertu ?

Présentation

Le présent rapport s’inscrit dans la continuité du travail consacré l’an dernier à la mise en place d’un SYstème de répartition des Moyens à la Performance et à l’Activité (SYMPA). A ce titre, vos rapporteurs se félicitent de ce que les principales recommandations de leur précédent rapport aient pu être suivies à l’occasion de la mise en place de SYMPA.

Ce travail a pour objectif de faire un état des lieux de la mise
en œuvre de la réforme budgétaire des universités
, qui se traduit à la fois par l’accès aux compétences et responsabilités élargies (RCE) et par la mise en place d’un nouveau système d’allocation des moyens.

Les propositions que les rapporteurs formulent sont inspirées par la recherche de l’équilibre et de l’efficience collective, afin que le Sénat contribue à l’important travail de réflexion qu’ont engagé l’ensemble des acteurs pour améliorer la mise en œuvre concrète de ces réformes.

A cet égard, les rapporteurs saluent l’implication de tous ceux qui participent à la concertation poursuivie par le ministère et/ou aux groupes de travail créés, notamment au sein de la CPU ou au
CNESER
.

Une réforme budgétaire contestée malgré une progression des crédits inédite

L’augmentation sans précédent des moyens en faveur des universités en 2009 a été occultée par les mouvements de protestation liés à la réforme statutaire des enseignants-chercheurs et à des polémiques inutiles sur les emplois.

En effet, en 2009, toutes les universités ont bénéficié d’une
augmentation moyenne de 6,8 % de leurs moyens
 dans le cadre du nouveau dispositif d’allocation, les progressions étant toutefois fonction du positionnement de leur dotation de référence par rapport à la moyenne du modèle. A titre de comparaison, la progression des moyens en 2008 n’a été que de 1,9 %.

Certaines annonces ont eu néanmoins un effet
« désastreux
 » :

– les suppressions d’emplois prévues au titre de la RGPP ont
été gelées pour 2009, 2010 et 2011. Ce gel permet de mettre fin à la contradiction dénoncée par vos rapporteurs de faire de la recherche et de l’enseignement supérieur une priorité nationale tout en diminuant les emplois ;

– le redéploiement de 150 postes entre les universités a été
d’autant plus mal perçu qu’il a concerné majoritairement les universités passant aux responsabilités et compétences élargies (RCE) et aurait dû se cumuler avec les suppressions d’emplois.

Une mise en œuvre délicate, qui nécessite des ajustements

Le passage à l’autonomie budgétaire des 18 premières universités est marqué par la prudence, voire des excès de prudence

Les personnels ont été payés dès janvier 2009 ; l’enveloppe salariale transférée est satisfaisante selon les acteurs.

Au 1er juillet 2009, le suivi de la masse salariale ne témoigne d’aucun dérapage majeur.

On constate toutefois :

– une prudence de la part des universités qui ne disposent pas nécessairement de l’ensemble des outils de pilotage adéquats ;

– une prudence excessive de la part des services
déconcentrés
 où, selon les acteurs de terrain, une certaine confusion semble exister entre contrôle budgétaire a priori et contrôle financier a posteriori.

Les rapporteurs appellent le ministère à faire le point et à harmoniser les pratiques. Par ailleurs, la possibilité de placer trimestriellement les sommes reçues au titre de la masse salariale leur apparaît conforme à
l’esprit de l’autonomie pour autant que ces placements soient non risqués.

La répartition opérée par SYMPA nécessite d’être améliorée pour 2010
afin de rendre le système plus juste et mieux accepté par les universités

Le modèle SYMPA alloue les crédits en fonction de l’activité et de la performance des universités dans deux domaines : la formation et la recherche.

S’agissant de la formation :

Ø La répartition de la part « activité » nécessite des aménagements afin de :

– mieux comptabiliser les étudiants accueillis par les universités, en particulier les doctorants, les étudiants en médecine, les étudiants des IUFM ;

– mieux appréhender les coûts de formation au regard de l’environnement (les coûts fixes sont plus élevés pour des universités de petite taille) ou des caractéristiques de leur cursus (la pondération
des étudiants en IUT nécessite d’être revue, le modèle actuel conduisant à une diminution sensible des moyens).

Ø La pertinence du volet « performance » de la formation doit être renforcée par l’accélération de la construction et de la mise en place des critères relatifs à l’insertion professionnelle des étudiants. Ceci implique une méthodologie commune à l’ensemble des universités, et de manière optimale à l’ensemble des établissements
d’ensei-gnement supérieur, afin de comparer objectivement les données produites.

S’agissant de la recherche :

Ø Le débat sur l’efficience des universités en matière de recherche, lancé notamment par la CPU, est légitime et témoigne d’une réalité : compte tenu des différences d’encadrement qui existent entre les universités, ces dernières n’ont pas les mêmes capacités de recherche. Il serait donc pertinent d’examiner les résultats des universités en
matière de recherche au regard des moyens dont elles disposent, c’est-à-dire apprécier leur efficience.

Ø Afin de ne pas complexifier le système, la prise en compte de l’efficience devrait pouvoir être effectuée au sein du modèle dans le cadre des calculs des parts activité et performance de la recherche.

S’agissant des enveloppes nationales de crédits réparties par le modèle :

Ø Un rééquilibrage se révèle nécessaire entre les niveaux licence (L) et master (M).

Le modèle d’allocation des moyens répartit les crédits définis notamment dans le cadre de 10 enveloppes nationales : 6 concernent la recherche, 4 concernent l’enseignement, les crédits des niveaux (L) et (M) étant respectivement définis pour la part « activité » et la part
« performance ». Le premier exercice a retenu des crédits identiques entre le niveau (L) et (M), ce qui est contestable, compte tenu du
coût a priori plus élevé du niveau (L) qui comprend plus d’étudiants et une année de plus de formation que le master. Un rééquilibrage doit être
négocié pour 2010.

Ø Sur cette question, il est nécessaire d’accroître la transparence du processus, notamment dans le cadre des documents budgétaires : ces enveloppes n’ont pas été connues des parlementaires, ni dans le cadre des réponses aux questionnaires budgétaires, ni dans le cadre du projet annuel de performances ; il serait donc opportun que la présentation du projet de loi de finances 2010 soit davantage détaillée de ce point de vue.

Présentation simplifiée du modèle sur la base du montant des
crédits répartis en 2009

   Enseignement Recherche Pilotage/gestionVie
étudiante
 Total
 Activité 60 % 20 %  80 % 
   – nombre d’étudiants présents aux examens – nombre d’enseignants « chercheurs
publiants »
  
  
 Performance 5 % 15 %  20 % 
   Part
« calculée »
sur la base de critères nationaux(80 % de la part performance)
  
 4 %  12 %   16
%
 
 – valeur ajoutée Réussite Licence ;- nombre de diplômés en master – cotation unités recherche –  
 Part
« négociée »
dans le contrat quadriennal(20 % de la part performance)
 4 % 
 – passage L1/L2- réussite en L3- part des mentions M à faible effectifs- taux
d’insertion
 – ressources issues de la valorisation- insertion des
docteurs
 – autoévaluation- pilotage immobilier- recrutement externes- ouverture des bibliothèques  
  + Engagements
spécifiques
 Total 65 %  35 %    100
%
 

Source : rapporteurs, à partir des réponses du MESR à leur questionnaire.

Les impacts structurels de la réforme ne sont pas acquis

L’autonomie comme le nouveau dispositif de moyens témoignent de logiques nouvelles qui devraient conduire à des modifications durables des modes de fonctionnement et de gestion pour un meilleur service rendu à la Nation : les universités sont-elles sur le chemin de la vertu ?

En 2008, le groupe de travail sénatorial avait insisté sur la nécessité d’inscrire les réformes dans la durée : il serait regrettable que, dans le contexte budgétaire « exceptionnel » de la mission interministérielle Recherche et Enseignement supérieur (MIRES), la mise en œuvre de
l’autonomie budgétaire, appuyée par un nouveau dispositif d’allocation des moyens, ne débouche pas sur des améliorations structurelles de notre système d’enseignement supérieur et de recherche.

Le dialogue au sein des universités

Si le dialogue entre les universités et leur tutelle est marquée par des avancées tangibles, la rénovation du dialogue entre les universités et leurs composantes reste un champ à approfondir : selon vos rapporteurs, les logiques de SYMPA devraient être a minima déclinées au sein des établissements afin que le dialogue de gestion puisse réellement exister. Deux points semblent
prioritaires :

– garantir autant que possible la crédibilité de SYMPA
par la variation des dotations si on veut impulser des changements internes par la responsabilisation : comment construire un dialogue de gestion en interne si l’université, au niveau national, ne peut pas se prévaloir pleinement de sa performance ou de son activité ?

– renforcer l’encadrement administratif des universités. Sur ce point, vos rapporteurs se félicitent de l’attractivité nouvelle observée cette année sur certains postes, témoignant ainsi d’un message positif de la LRU sur l’image du système universitaire.

La transparence du système

La transparence de la gestion du système universitaire reste un point noir, compte tenu de l’inadaptation des systèmes d’information. La Cour des comptes estime que les comptes des universités sont « affectés de lacunes graves et multiples », aucune, même au sein des universités
« autonomes » ne peut être réellement « considérée comme dotée d’une gestion comptable et financière aboutie ».

Vos rapporteurs invitent le ministère à faire preuve de vigilance dans le cadre des futurs passages à l’autonomie, et réitèrent le souhait de voir la transparence financière et la qualité des comptes évaluées dans le cadre du contrat quadriennal.

Plagiat : faits et gestes dénoncés par Jean-Noël Darde

Comme la période des congés est souvent propices aux réflexions, nous profitons du début de l’été pour la mise en lumière d’un article publié sur le blog de Jean-Noël Darde. Il va sans dire que nous avons évidemment obtenu son autorisation pour l’occasion puisqu’il s’agit d’un sujet sensible : le plagiat.
Après un échange téléphonique que notre rédaction aura eu avec Jean-Noël Darde, il tient à préciser que ce qui interpelle le plus dans ces sujets n’est pas le manque de considération que l’on peut avoir envers les plagiaires, mais le manque de prise en compte effective que des pairs peuvent – de fait – avoir de ces sujets. Il remarquera d’ailleurs que depuis son article peu de cas aura été fait des éléments dénoncés.

L’Université Lyon 3, le plagiat, et les ratés de la Francophonie

Posté par Jean-Noël Darde

Plagiat universitaire, évaluation et excellence

Dans un article récent (Le Monde, 25 mai 2013), Valérie Pécresse reprochait au gouvernement d’avoir peur de « l’évaluation » dans l’enseignement supérieur et la recherche.

Qui oserait s’opposer au principe de l’évaluation ? Valérie Pécresse serait cependant plus convaincante si, quand elle était ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, elle avait elle-même créé les moyens d’une évaluation crédible.

On rappellera seulement que, comme nous l’avons établi sur ce blog, la machine à évaluation « répondant à des standards internationaux » que Valérie Pécresse avait mis en place pour labelliser les fameux « laboratoires d’excellence » n’était pas parfaite. Un des rares doubles LABEX attribués l’avait été à un laboratoire dirigé par des enseignants-chercheurs plagiaires où a été soutenu ces dix dernières années un nombre significatif de thèses plagiaires.

On rappellera encore que parmi les neuf membres de la Commission déontologie de l’Université Paris 8 qui ont confirmé la validation d’une thèse plagiaire à près de 100% (cf. L’Université Paris 8, sa direction, sa Commission déontologie et sa thèse-pur-plagiat écrite « sous le signe de l’excellence »), on comptait plusieurs experts de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES).

Le cas présenté ci-dessous interroge aussi le sérieux d’une « évaluation », celle d’une thèse soutenue à Lyon 3, en 2011. Il s’agit d’une thèse rédigée sous la direction de Christian Philip, ancien Directeur des enseignements supérieurs au Ministère de l’éducation nationale, ancien Directeur du cabinet de François Fillon, alors que ce dernier était ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ( >cf. les éloges de François Fillon), ancien député UMP, aujourd’hui recteur de l’Académie de Montpellier.

Valérie Pécresse avait confié en 2008 à Christian Philip la rédaction d’un rapport sur le rapprochement Universités-Grandes Écoles. Il y prônait notamment la codiplomation au niveau du doctorat afin
de ne pas « écarter nos meilleurs étudiants du doctorat » :

Pour le doctorat, nous prônons également la codiplomation comme le prévoit l’arrêté du 7 août 2006 sur les études doctorales.
Il faut aussi regretter le faible nombre des étudiants des grandes Ecoles qui vont poursuivre leur formation en doctorat. Même si les statistiques révèlent que la comparaison internationale est difficile à établir, il y a là un incontestable défi à relever pour faire de l’innovation un levier de notre développement. Le déficit de nos entreprises à valoir sur l’expérience du doctorat rend l’objectif prioritaire. Écarter nos meilleurs étudiants du doctorat est paradoxal. Amener plus d’étudiants jusqu’au doctorat doit constituer un objectif commun.

Christian Philip a aussi été nommé en juin 2007 représentant du Président Nicolas Sarkozy pour la Francophonie.

* * *

Les voies de la Francophonie sont impénétrables.

Ce cas nous a été soumis par des collègues enseignants-chercheurs algériens las de devoir se taire devant des cas consternants de plagiats universitaires. Ces collègues algériens sont d’autant plus choqués quand ils voient certains se prévaloir de thèses grossièrement plagiaires soutenues et validées en France pour obtenir des postes dans les universités algériennes.

Ziad Lattouf, avocat algérien, « expert international», a soutenu le 7 janvier 2011 à l’Université Lyon 3 une thèse de droit international et relations internationales : La mise en œuvre de l’accord d’association Algérie Union européenne dans les perspectives du respect des
droits de l’homme
 (version intégrale, ici en ligne ou là : fichier pdf de la thèse).

Cette thèse est si évidemment plagiaire que l’on est conduit à se demander pourquoi et comment, chargés de l’évaluer, ni le directeur de thèse, ni les deux rapporteurs, ni les autres membres du
jury de soutenance, tous éminents juristes, ne se sont rendus compte de rien.

Cette thèse étant ce qu’elle est, il reste difficilement imaginable que le professeurChristian Philip ait vraiment dirigé et
évalué ses « recherches », comme l’affirme Ziad Lattouf, avec emphase et une certaine flagornerie, dans ses remerciements.

On notera (voir ci-contre) que ces remerciements sont plagiés !

Non seulement les plagiats commencent dès les
remerciements, ouvrent l’introduction et arrivent le plus souvent en séquences de plusieurs pages d’affilée, mais ils sont particulièrement grossiers et facilement repérables.

On trouve dans cette thèse jusqu’à 42 pleines pages du même document, le Rapport annuel 2007 rédigé par la Commission Nationale Consultative de Promotion et de Protection des Droits de l’Homme (CNCPPDH).

La quarantaine de pages copier-coller depuis ce rapport (pages 7 à 14, 16 à 26, 30 à 35, 37 à 40, 49 à 63 et 123 à 125 du document original) sont surlignées en couleur violette sur cette version pdf.

La distraction des autres membres du jury de soutenance est tout aussi étonnante. Les deux rapporteurs sont des juristes, experts internationaux. La distraction du premier rapporteur, Mohammed
Bedjaoui – « professeurexpert international »,
notamment ancien ministre Algérien de la justice (1964-1970), ancien Président de la Cour internationale de justice de la Haye (1994-1997), ancien membre du Conseil constitutionnel de la
République algérienne démocratique et populaire (2002-2005) et ancien Ministre des affaires étrangères (2005-2007) –  est particulièrement incompréhensible.

La distraction du second rapporteur, Emmanuel
Decaux, Professeur de classe exceptionnelle à l’Université Paris 2, Directeur d’école doctorale (École doctorale de droit
international, droit européen, relations internationales et droit comparé
) et expert de la défunte AERES, est tout aussi incompréhensible que celle du premier rapporteur.

Le Président du jury de soutenance était le professeur Michaël Karpenschif, Directeur du Centre d’Études Européennes (CEE) de Lyon 3, la structure d’accueil de Ziad Lattouf. Christian Philip  a été le directeur du CEE et en reste un membre actif.

Le professeur Stéphane Doumbé-Billé, Directeur du Centre de Droit International (CDI) de Lyon 3 était le cinquième membre du jury. CEE et CDI sont coiffés par l’EDIEC (Équipe de Droit International, Européen et Comparé) dont dépendent aussi le Centre de Recherche sur le Droit International Privé (CREDIP),  et l’Institut de Droit comparé Édouard Lambert (IDCEL).

Stéphane Doumbé-Billé avait dirigé une célèbre thèse plagiaire évoquée plusieurs fois sur ce blog et dans la presse (cf.  >400 pages de plagiats, 20,33 euros ! voir la partieANRT : édition et diffusion commerciale d’une thèse jugée plagiaire par le CNU et le Conseil d’État). Malgré la décision de la 2e section du CNU (Droit public) confirmée par le Conseil d’État, l’Université Lyon 3 s’est toujours refusée à annuler cette thèse au prétexte que « la volonté intentionnelle de la fraude ou du plagiat ou de contrefaçon n’a pas été démontrée et le bénéfice du doute doit être appliqué » (cf. l’article d’I. Rey-Lefebvre, Le Monde du 02.05.2012).

Le cas de Farrida Kaddous Hamadi, dont le nom figure sur la couverture de la thèse de Ziad Lattouf comme membre du jury, est particulier. Elle fait l’objet de remerciements un peu énigmatiques,
« Je tiens également à remercier Farida Hamadi Kaddous de faire l’effort pour participer à ce jury mais en vain ».
Farida Hamadi Khaddous, maître de conférences à l’Université d’Oran, n’a en effet pas siégé à la soutenance. Peut-être avait-elle vraiment lu la thèse et a-t-elle préféré s’abstenir. Elle
n’était de toute façon pas en mesure de s’affronter aux autres membres du jury.

Bien plus que les plagiats et l’auteur plagiaire, ce sont donc bien les conditions de l’évaluation de cette thèse et la décision des membres du jury de soutenance d’accorder la mention honorable au doctorant qui posent ici le principal problème. S’il est de manière générale certainement excessif de reprocher aux membres d’un jury de s’être laissés abuser par des formes subtiles de plagiats, on est ici dans un tout autre cas, celui de plagiats à l’échelle industrielle, grossiers et évidents.

La nécessité d’une instance indépendante à l’abri des pressions et conflits d’intérêts

Alerté de cette situation par une source universitaire algérienne en mars 2013, le Président de l’Université Lyon 3, Jacques Comby, aurait ouvert une enquête (mais la thèse plagiaire est toujours
disponible sur le site de l’Université Lyon 3). Aucune instance locale d’une université – que ce soit une commission d’enquête, une commission disciplinaire, une commission de déontologie ou d’éthique… – ne paraît en réalité en mesure d’aborder ce type de cas en toute indépendance; le cas de mon université, Paris 8, en témoigne. Le précédent, déjà à l’Université Lyon 3, d’un refus d’annuler une thèse au curieux prétexte que l’intention de plagier ne fût pas prouvée ne pousse pas à l’optimisme.

Dans le cas de Ziad Lattouf, l’importance et la nature de ces plagiats étant ce qu’elles sont, les membres du jury ont-ils tous fait preuve d’une totale incompétence pour évaluer cette thèse ?
L’hypothèse est peu plausible. D’autres facteurs ont certainement été pris en compte. De quelle nature ? On comprend mieux que poser les bonnes questions, aller jusqu’au bout de l’enquête et arriver aux bonnes conclusions exigent l’absence de conflits d’intérêts et une totale indépendance.

À ce jour, Geneviève Fioraso n’a pas plus réagi que Valérie Pécresse face aux situations de plagiats universitaires qui lui ont été soumises – même les plus scandaleuses, par exemple le cas d’un membre plagiaire du CNU et celui de la tolérance au plagiat de la CP-CNU (cf. La Commission permanente du Conseil national des universités (CP-CNU),le « vide juridique » et la tolérance au plagiat).

La loi Fioraso sur l’Enseignement supérieur et la Recherche pourrait pourtant être l’occasion de créer de nouvelles conditions de saisine d’instances, libres de conflits d’intérêts, susceptibles de traiter en toute indépendance les affaires de plagiat universitaire – que ce soit le plagiat des doctorants mais surtout, plus grave et de plus en plus fréquent, le plagiat des enseignants-chercheurs (des doctorants plagiaires, qualifiés et nommés sur des postes d’enseignants-chercheurs, deviennent par la force des choses des universitaires disposés à plagier…). Pour l’instant, la seule parlementaire à s’être montrée sensible à ce problème est Marie-Christine Blandin, Présidente de la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat.

Notons que le projet de loi ESRFioraso se propose de valoriser le doctorat et le titre de docteur (cf.  Le doctorat bientôt au Sénat) et
notamment de le prendre en considération pour l’accès à la haute fonction publique. Mais il serait dommage de valoriser un doctorat dévalorisé par l’absence de réaction face à la délivrance du titre à des plagiaires compulsifs.

Le projet de loi relatif aux droits et obligations des fonctionnaires, défendu par Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique – sa présentation en Conseil des ministres est programmée
en juillet  – prévoit la création d’un dispositif d’alerte éthique et préciserait des mesures de protection en faveur des lanceurs d’alertes. Indépendamment de mesures spécifiques au Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, cela pourrait favoriser plus de transparence autour des cas les plus scandaleux en matière de plagiat universitaire.

* * * 

Les victimes des plagiats de Ziad Lattouf ne sont pas seulement ses plagiés. La première victime serait d’abord le candidat non-plagiaire à un poste universitaire en Algérie qui serait classé derrière l’auteur de la thèse plagiaire validée par l’Université Lyon 3.

Ce ne sont pas quelques paragraphes, ou même quelques pages, qui ont été plagiés, c’est l’essentiel de la thèse. Pour 140 des 250 pages de la thèse proprement dite [322 pages dont il faut soustraire la table des matières, la copieuse bibliographie (pp. 270 à 283) et les annexes (pp. 284 à 320)], les plagiats ont été déjà documentés par des collègues algériens, avec leurs sources identifiées et surlignées. Une fois ce travail achevé, ce seront probablement encore plus de pages plagiaires qui seront documentées.

Avec l’avant-propos de cette thèse, page 8, les membres du jury disposaient d’un texte attribuable, sans trop de risque de se tromper, à Ziad Lattouf. Son niveau de langue comparé au reste de la thèse ne pouvait pas ne pas les alerter :

La segmentation de la place des droits de l’homme sous l’influence de Barcelone dans la promotion de ces droits d’où leur importance se dégage de l’accord d’association Algérie-Union européenne. Elle s’appuie à la fois sur un projet Euro-Méditerranéens lancé à Barcelone et sur un projet bilatéral. De nombreuses interactions existent donc les deux parties de la thèse.

La méthode consiste pour l’essentiel la promotion et le respect des droits de l’homme et leur mise en oeuvre, à partir des textes communautaires ou euroméditerranéennes ou international (Déclaration de Barcelone, accord d’association Algérie-Union Européenne, conventions internationales…), à se poser la question de savoir ce que cet acte signifie : i) au plan international. ii) Pour l’Union européenne. iii) Pour l’Algérie.

Toutes les parties qui tranchent avec ce niveau de langue, l’essentiel de la thèse, se désignent comme plagiats probables. Il reste cependant à trouver les textes originaux sources de ces plagiats. Des recherches simples sur Google ont permis de retrouver les premiers, l’utilisation d’un logiciel anti-plagiat a apporté des compléments significatifs sans pour autant tout repérer.

De quoi est faite une thèse plagiaire de droit à Lyon 3

La thèse de Ziad Lattouf est disponible sur le site dédié de
l’Université Lyon 3 ou ici en format pdft. Les  exemples de plagiats présentés ci-dessous illustrent la méthode simplette de rédaction de cette thèse.

Quelques paragraphes de plagiats se glissent au début des remerciements et de
l’introduction. Puis suivent, en guise de chapitre 1 de la « Partie introductive : les rapports Algérie-Union européenne » sept pages de thèse (pp. 27 à 35) issues d’uncopier-coller depuis le site de Jacques Leclerc, linguiste, Professeur émérite de l’Université Laval, au Canada (texte source surligné en jaunesur ce fichier pdf, pp. 9 à 14).

Le pli est pris. Le reste de la thèse sera à l’avenant.

Plagiats-pp.151-155.these-Z.-Latouff-300x250Ziad Lattouf a une conception simple du Droit comparé, validée par les membres de son jury de soutenance : il copie-colle, s’approprie et met les uns à la suite des autres de longs
documents produits par la Communauté européenne, le gouvernement algérien et des institutions de ce pays et les instances de la Francophonie. Il ne les compare jamais, pas plus qu’il ne les commente.

On retrouve le texte de ce « document d’information du greffier de la Cour européenne des Droits de l’Homme » (septembre 2003, ici, dans sa version pdf, surlignée en couleur orange) en  copier-coller des pages 150 à  155 de la thèse de Ziad Lattouf.

Comme on le constatera en se rapportant à sa thèse, le seul apport de Z. Lattouf en terme « d’habillage » de son copier-coller est  ici un « ensuite ».

Dans d’autres plagiats, ses interventions sur le texte plagié sont plus fréquentes :D’abord, ou Tout d’abordEnsuite et D’ailleurs… Ziad Lattouf, qui n’utilise pas les guillemets, a, de temps à autre, l’art de signaler les sources de ses plagiats dans des notes de bas de pages d’apparence très innocente…

Au besoin, quand le document qu’il plagie concerne la Tunisie plutôt que l’Algérie, Ziad Lattouf ne craint pas d’intervenir sur son copier-coller et de substituer le nom de l’Algérie à celui de la Tunisie, ou encore « autorités algériennes » à « autorités tunisiennes« . Dans l’illustration ci-contre, on trouve à gauche la source du plagiat, un extrait de la page 105 du document Guide sur les Droits de l’Homme dans le Processus de Barcelone / Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme par Khémais Chammari  et Caroline Stainier, 221 pages, et à droite, un extrait de la page 94 de la thèse de Ziad Lattouf.

Cet emprunt, certes le plus significatif, est loin d’être le seul. Des copier-coller d’autres séries de pages de ce même texte de K. Chammari et C. Stainier (copier-coller des pages 22 à 26, 83 à 85 et 100 à 106) se retrouvent dans la thèse de Z. Lattouf.

L’article (ci-contre surligné en jaune, et ici dans sa version pdf) de Pierre Kamtoh, juge à la Cour de justice de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique

Centrale (CEMAC) est « copier » de la page 5 à la page 16 de ce document et « coller »sur la thèse, de sa page 190 à la page 200.

 

À l’exception de quelques paragraphes, tout le texte d’un « mémorandum sur les réformes en Algérie » de 2004 (version pdf surlignée, ici)diffusé par l’ambassade algérienne à Ottawa, est copier-coller pour fournir les pages  226 à 234 de la thèse de Z. Lattouf.

 

Les pages 234 à 245 de la thèse de Z. Lattouf sont pour l’essentiel constituées descopier-coller de l’article intégral « La politique européenne de voisinage » opérés depuis le site de la Documentation française.

Le 7e exemple de plagiat copieux, vraiment très copieux, concerne la reprise quasi intégrale dans la thèse de Ziad Lattouf de la déclaration
finale (du 4 novembre 2008) d’une Conférence Ministérielle sur leProcessus de Barcelone(version pdf, plagiats surlignée en vert, ici).

Ce copier-coller s’étend sans interruption de la page 248 à la page 266 de la thèse et précède la Conclusion générale.
Ce document n’a donc en aucun cas, pas plus que les autres sources de plagiats déjà présentées, un statut d’annexe de la thèse.

D’ailleurs, il existe bien une partie spécifique « Annexes » qui occupe, après une longue et curieuse bibliographie, les pages 284 à 320 de la thèse.

* * *

L’Université de Lyon, dont Lyon
3 est un des membres fondateurs, regroupe une vingtaine d’établissements d’enseignement supérieur. Elle affiche sur son site Internet un texte de Sensibilisation à la lutte contre le
plagiat
. De la déclaration d’intention – peut-être d’abord une opération de communication – à la pratique, la route est longue.

*

AERES et classements

Nous faisons suivre ce message reçu à la rédaction :

Chers collègues,


J’ai eu récemment connaissance de plusieurs textes signés par un certain nombre de collègues, historiens ou sociologues, sur les
questions d’évaluation.

Je comprends tout à fait qu’elles soient essentielles pour nous, chercheurs, et suscitent des débats intenses. Je souhaiterais
simplement aujourd’hui vous apporter quelques précisions particulièrement importantes, me semble-t-il.

 

        
L’évaluation des unités reposera sur quatre grands critères (« qualité scientifique et production » ;
« rayonnement et attractivité » ; « stratégie, gouvernance et vie du laboratoire » ; « appréciation du projet proposé »).

        
Il est bien évident que l’évaluation sera, par conséquent, avant tout qualitative.

        
Les publications n’interviennent que dans le premier critère à côté d’autres éléments comme la présence de contrats de recherches
incitatifs (Ministères, A.N.R., Europe).

        
Un classement ou une reconnaissance de certaines revues comme revues de rang A n’implique pas une approche bibliométrique.

        
Au contraire, les directeurs de l’A.E.R.E.S. ont récemment souligné les insuffisances de tout indicateur  quantitatif de
bibliométrie.

        
Je rappelle que nous avons fixé le seuil qui permet d’être déclaré “publiant” très bas (deux publications de rang A en quatre ans pour
les enseignants-chercheurs et 4 pour les chercheurs).

        
Je confirme que parmi les publications de rang A, en SHS, seront pris en considération les ouvrages de recherche, les chapitres dans
des ouvrages collectifs de recherche, les éditions de texte ainsi que les communications dans des colloques publiés de façon sérieuse. Il me semble donc qu’au-delà de ce seuil, vraiment bas, nous
avons toute liberté de publier dans des supports très différents, y compris de contribuer au lancement de nouvelles revues, par définition pour l’instant non référencées.

        
Des commissions d’actualisation des listes qui existent déjà, seront mises en place d’ici le mois de décembre.

        
Nous procédons à un essai de classement des revues en reprenant les contributions des travaux effectués par les sections du CNRS
lorsqu’elles existent, parce qu’il nous paraît inutile d’empiler les évaluations et de refaire ce que les comités de rédaction ont déjà souvent très bien effectué et parce qu’un classement a un
double effet pédagogique : sur les revues afin qu’elles améliorent éventuellement leurs pratiques; sur les chercheurs afin de les alerter sur l’importance de publier dans des revues de niveau
international.

 

Nous pourrons communiquer officiellement, et dans le détail, sur ces questions très prochainement mais je tenais d’ores et déjà à vous
rassurer en répondant à un certain nombre d’objections ou de remarques fort pertinentes et légitimes qui figurent dans le texte que j’ai lu.

Bien cordialement à vous, et à bientôt.


Patrice Bourdelais

Délégué scientifique coordinateur SHS

AERES

Nouvelles de l’Appel au retrait du classement des revues de l’AERES

Chères et chers collègues,

Vous avez été nombreux à bien vouloir signer l’Appel des Revues et nous vous en remercions. Cet appel a d’ores et déjà eu quelques effets :

— Jean-François Dhainaut, président de l’AERES, a fait un certain nombre de déclarations, rapportées dans une dépêche de l’Agence Education-Formation n° 102848 du 14 octobre à 10 h 08 : http://fr.groups.yahoo.com/group/parislinguists/message/2138

— Patrice Bourdelais, coordinateur SHS pour l’AERES, a publié un communiqué apaisant : http://www.fabula.org/actualites/article26263.php

Ces réactions ne correspondent pas à ce que nous demandions : nous demandions et demandons toujours un retrait complet et définitif, car c’est le principe même d’un tel classement et l’usage qu’entend en faire l’AERES que nous contestons. Nous récusons sa conception quantitative de l’évaluation.

Pour nous faire entendre, nous commencerons par nous rendre le mardi 28 octobre en début d’après-midi au siège de l’AERES. Nous remettrons alors l’Appel et la liste des signataires au Comité directeur de l’Agence.

Merci de nous aider à faire le plein de signatures d’ici là : n’hésitez pas à faire signer l’Appel autour de vous.

Pour ceux qui voudraient se joindre à la démarche, nous nous retrouverons à 14h45, place de la Bourse.

Par ailleurs, nous avons le plaisir de vous annoncer qu’un site d’information et de discussion sur l’évaluation et la bibliométrie a été ouvert à l’adresse suivante : https://evaluation.hypotheses.org

Bien cordialement à tous,

Laurence Giavarini (Université de Bourgogne, porte-parole de SLU), David Lefebvre (Paris IV), Sylvain Piron (EHESS), Sophie Roux (Grenoble II-IUF).

Editorial du n° 231-232 – « Innovation sociale »

par Philippe Naszalyi
Directeur de publication

Choisir de résumer dans un titre à la fois, elliptique et provocateur, ce numéro double qui paraît au cœur de l’été est un triple pari.

Celui de croire d’abord, que le matérialisme ambiant, qui véhicule la dépersonnalisation du travail, redevenu une simple « force », et non le fruit de l’action d’êtres humains, va mener, si l’on n’y prend pas garde, aux mêmes antagonismes que ceux qui, nés au XIXe siècle se sont épanouis dans les tourments du XXe. Belle régression pour ce XXIe Siècle débutant, qui se glorifie déjà tant de sa « technologie immatérielle » que de ne se développer qu’avec les méthodes de gouvernance humaine, les plus archaïques. Le formidable (au sens étymologique du terme) développement économique de la Chine, qui peut bien se targuer de ses 3 000 ans de civilisation, ce qui ne l’exonère pas de son extrême barbarie humaine, est là pour conforter tous ceux qui, hommes de pouvoir (économique ou politique) pensent que la démocratie est finalement plutôt un obstacle à l’enrichissement matériel des firmes.

La Chine enseigne à ces modernes autocrates, que l’on peut se passer, enfin, des règles qui encadrent le travail, des organisations représentatives de salariés ou de cadres, des droits ou libertés fondamentales où le général l’emportait sur le particulier, et la loi sur le contrat.

On peut vendre une entreprise ou la dépecer, avec ou sans ses salariés, comme on prétendait dans les manuels d’histoire de jadis, que faisaient les Seigneurs en vendant villages et serfs pour payer une dote ou acquérir les atours d’une dame.

Les « modernes libéraux » ou ceux qui se réclament d’une telle idéologie, dont ils n’ont souvent pas assimilé toutes les subtilités, sont en fait les adversaires convaincus de la Liberté, du moins celle de ceux qui ne possèdent rien. « Patriot Act » ou jugement devant « un tribunal d’exception » de prisonniers de Guantanamo, ratifié par un juge fédéral aux Etats-Unis, ont leur pendant en Europe qu’on se rassure, avec les délais et camps de rétention des étrangers, les « règles de sécurité », imposés aux citoyens qui voyagent (pas aux marchandises qui rapportent), par des Commissaires européens, dont celui des transports (hélas Français), toujours prêts à répondre aux injonctions du « Grand Frère », pour ne pas avoir l’air d’être en retard d’une régression de Civilisation. A l’heure très bienvenue de la création de l’Union pour la Méditerranée, comme on est loin du mot qui tire pourtant son nom du « civis » romain, le citoyen libre et responsable, modèle de Cicéron. Désormais invoquer « civis Romanus sum » comme le fit l’apôtre Paul est à ranger (1), avec les Droits de l’Homme, au rayon des antiquités mal venues à rappeler.

C’est au cœur de cet été, marqué par des Jeux Olympiques dignes non de l’Antique, mais de ceux de Berlin de 1936, que la firme Adidas, « sponsor » (le mot de « parrain » ne peut s’appliquer à de telles choses), annonce que l’ouvrier chinois est devenu trop cher (2) et que l’Inde, mais aussi peut-être, le Cambodge, le Laos, voire les pays de l’ancienne URSS, offrent des ouvriers « low cost », à moins de 100 Euros mensuels. On est bien dans la logique, celle de « compression des coûts de production » très clairement affirmée par Charles Beigbeder (3)dans son rapport au secrétariat à la consommation en France.

Que nos lecteurs se rassurent, ce retour dans le XIXesiècle ne nous fait pas entrer dans une apologie des pensées de Karl Marx qui avait écrit de belles analyses de ce capitalisme, digne des années 50… d’il y a deux siècles. Nous pensons toutefois, qu’« il y a […] risque de voir se
répandre une idéologie radicale de type capitaliste qui refuse jusqu’à (la) prise en considération (des phénomènes de marginalisation et d’exploitation […], de même que des phénomènes d’aliénation humaine), admettant a priori que toute tentative d’y faire face directement est vouée à l’insuccès, et qui, par principe, en attend la solution du libre développement des forces du marché
. » comme le rappelait, déjà en 1991, un auteur qu’on ne peut soupçonner de marxisme, le pape Jean-Paul II (4).

C’est au contraire parce que nous pensons et croyons qu’« à l’intérieur de chaque pays comme dans les rapports internationaux, le marché libre (est) l’instrument le plus approprié pour répartir les ressources et répondre efficacement aux besoins (5) » que nous prônons d’autres pratiques de management des entreprises et les publions !

Cette double référence à la Doctrine sociale de l’Eglise est également un clin d’oeil à l’une des premières citations mises en exergue, par le professeur Humbert Lesca dans le dossier qui a pris comme titre même, la démarche de « veille anticipative » qui porte son nom : L.E.SCAnning. Loin d’être ratiocination d’universitaires, comme on aime parfois à le croire, pour s’exonérer de toute réflexion prospective, dans certains milieux dits « managériaux », cette méthode, illustrée par les articles de deux de ses « élèves » M.-L. Caron-Fasan et S. Blanco, apporte preuves, mises en pratique et préconisations aux entrepreneurs, cadres et dirigeants qui souhaitent faire autre chose que de la navigation à courte vue. Un peu plus de veille stratégique, d’attention et de modestie aurait sans doute évité à quelques grands groupes comme Alcatel, associé à Lucent, Vivendi ou naguère le Crédit Lyonnais de sombrer dans les affres des navigateurs à la godille, fiers de leurs « peaux d’âne », acquises une fois pour toutes, et enfermés dans leur splendide autisme. Les salariés, et parfois les contribuables, embarqués avec ces « génies des affaires » en ont aussi de cuisants souvenirs ! Un peu plus d’attention et d’écoute des autres, c’est-à-dire de veille, eussent sans nul doute évité des déboires. On peut constater des errements plus mauvais aussi, chez nombre de « banquiers » toujours si prompts à donner notes et leçons de gestion et qu’on trouve très silencieux
ces derniers temps !

Nous ne rappellerons jamais assez l’excellente formule de Jeffrey Pfeffer et Robert Sutton que les « pratiques managériales ne font qu’un usage très limité des connaissances accumulées par la recherche en management » (6) et que nombre d’échecs d’entreprises s’expliquent ainsi.

Ce titre d’Innovation sociale…

Ce titre d’Innovation sociale, qui constitue donc un pari, signifie aussi qu’il n’est d’entreprises quoi qu’on en croit, que collectives. Pour continuer à filer la métaphore maritime comme le souligne Aude d’Andria, (page 18), cela vaut pour la démarche du Professeur Lesca et de son « équipage » comme pour François Angoulvant, co-auteur d’un article franco-québécois (page 53), et qu’on connaît jusque-là, mieux pour son aventure brillante de la « Route du Rhum ». Qu’on ne nous dise pas alors que la recherche en Gestion est déconnectée des réalités. Les quatre articles du deuxième dossier : « Management de Projets » sont le fruit de l’étude et de l’application de méthodes pour mettre en place des réalités tangibles, construites et reproductibles par des équipes d’hommes et de femmes… ce qui est le propre de la science et de la pratique.

Les contributeurs de ces articles, démontrent également l’internationalisme de notre revue, entre Atlantique et Méditerranée, notamment.

Et tant pis si les différents auteurs de différents classements, enfermés dans leur microcosme lilliputien, continuent de jouer à « La piste aux étoiles » (7)pour reprendre le titre d’un très bon papier.

Ils sont au temps de la RTF (8)alors qu’Internet ouvre le monde, sauf… en Chine. C’est cette démarche arbitraire, mais dangereuse pour l’avenir de la recherche française si les pouvoirs publics ou l’AERES (voir page 39) y donnent la main, que dénonce également (9), le directeur du département des sciences du vivant du CNRS. On ne peut trouver meilleur voisinage pour ces Sciences de l’Homme et de la Société, bien vivantes dans les objets qu’elles étudient, dans lesquelles on classifie la gestion ou l’économie, notamment.

Pari enfin, dans ce numéro, que celui de faire naître un débat entre auteurs. Parce que la jeune Recherche internationale francophone s’exprime le plus souvent dans nos colonnes que nous leur avons toujours largement ouvertes, nous avons acquiescé sans hésiter pour créer ce cahier de débats : « Économistes et gestionnaires débattent sur la RSE ». C’est le premier. Nous souhaitons qu’il soit suivi d’autres et nous savons que cette volonté est partagée par tous les contributeurs.

Je ne reviendrai pas en détail sur ce cahier qui présenté différemment, mis en page différemment, a fait l’objet d’une introduction spécifique (page 85) et d’une présentation de son coordinateur, Damien Bazin (page 87).

Notre conviction est également, que nous devons accentuer la pluridisciplinarité de notre revue, déjà multiculturelle par son internationalisation.

Il n’est pas une approche des organisations, mais des approches qu’il faut confronter, comparer et qui se complètent. Le cloisonnement est fruit de la volonté administrative passée qui est encore incarnée dans le CNU, maintenu malgré la LRU (10) comme une « jurande échevinale supérieure », pour reprendre, sans en épouser toutes les conclusions, la charge contre ce dernier, de Philippe Even, directeur de l’Institut Necker ! (11)

Nous tenons beaucoup à ces comparaisons avec ces autres sciences dites « inexactes » que sont celles du vivant pour rappeler aussi aux organismes bureaucratiques que les SHS ne doivent pas être négligées par un retour à un matérialisme positiviste du XIXe siècle. Pas plus qu’en détournant la pensée d’Hegel, les nazis n’ont apporté la liberté par le travail aux déportés de Dachau et d’Auschwitz, pas plus, l’on ne parviendra à la « Vérité par la Science » quoi qu’en ait prédit Camille Flammarion. Il y a, décidemment, mieux à faire qu’à reprendre les vielles lunes idéologiques du XIXe siècle. Serait-ce seulement par peur ou par paresse qu’on s’abstiendrait de retravailler sur les concepts toujours à améliorer de gouvernance humaine, de rapports sociaux, du moins si l’on est bien encore dans une société qui se dit démocratique et libérale ? Notre choix de recherche et de publication est celui de l’innovation sociale qui s’oppose naturellement à la maximisation du profit et au court-termisme économique et politique et complète l’innovation matérielle et technique indispensable, puisqu’elles sont ordonnées toutes ensembles au service de l’Homme.

L’effondrement du système communiste en Europe, a laissé place à une immense anémie intellectuelle en bien des domaines de la pensée, et de la fin de l’histoire à une « gestionite » sans réflexion, on a oublié que le perfectionnement des pratiques humaines était toujours à recommencer ou à approfondir.

La RSG, à sa modeste part, entend contribuer à cette réflexion et à cette recherche innovantes dans ce vaste domaine des Sciences Humaines et Sociales, grâce à son réseau international où collaborent praticiens des entreprises et des organisations comme les universitaires.

1. Actes 16 verset 37.

2. Daniel Eskenazi : « Les chaussures made in China trop chères », Le Temps, CH, mardi 29 juillet 2008.

3. « Le présent rapport préconise le développement du modèle économique du « low cost » (le bas coût) dont l’objectif est de faire baisser durablement les prix, grâce à la compression des coûts de production, sans pour autant remettre en cause la qualité intrinsèque du produit ou la sécurité », Ministère de l’économie, des finances et de l’emploi ; La Documentation française, Paris, 2007, 183 pages.

4. Lettre encyclique Centesimus Annus, À l’occasion du centenaire de l’encyclique Rerum Novarum., « Du Saint Père Jean-Paul II à ses frères dans l’épiscopat, au clergé, aux familles religieuses, aux fidèles de l’Eglise catholique et à tous les hommes de bonne volonté à l’occasion du centenaire de l’encyclique « Rerum Novarum. », Rome 1ermai 1991, paragraphe 42.

5. Centesimus Annus, paragraphe 34.

6. « Hard Facts, dangerous half-truths & total nonsense » Harvard Business School Press, 2006, traduction de l’américain par Sabine Rolland, éditions Vuibert, Paris 2007, 265 pages.

7. Gérard Charreaux & Michel Gervais. Editorial : « La piste aux étoiles » – un commentaire sur le dernier classement des revues élaboré par la section 37 du CNRS, » Revue Finance Contrôle Stratégie, Editions Economica, vol. 10 (4), pages 5-15, décembre 2007.

8. « La Piste aux étoiles » était une émission de la Radiodiffusion Télévision française (RTF). Créée en 1950, cette émission de cirque de Gilles Margaritis, disparut en 1976. Elle était à ses débuts programmée le mercredi soir, veille du congé scolaire d’alors le jeudi et était destinée aux enfants

9. Frédéric Dardel : « L’art difficile de l’évaluation scientifique : l’exemple de la recherche biomédicale », Les Echos, 4 septembre 2007.

10. Loi LRU ou loi Pécresse : loi no2007-1199, du 10 août 2007, « relative aux libertés et responsabilités des universités »

11. Philippe Even : « faillites et carences de la recherche médicale française », 15 juillet 2008.

Rapport CDHSS : des conclusions souvent trop généralistes selon le CDHSS

Rapport CDHSS : des conclusions souvent trop généralistes qui mériteraient une étude plus approfondie de chaque filière

Mercredi 13 octobre 2010, le Conseil pour le développement des humanités et des sciences sociales (CDHSS) a remis à Valérie Pécresse son rapport final “Pour des sciences humaines et sociales au cœur du système d’enseignement supérieur et de recherche”.

Le 18 mai dernier, l’UNEDESEP, par le biais de Promotion et Défense des Etudiants, avait été auditionnée par ce comité pour apporter son expertise sur les filières qu’elle représente.

Face à la diversité des formations du secteur des Sciences Humaines et Sociales, l’UNEDESEP regrette qu’une étude plus précise des problématiques inhérentes à chaque filière n’ait pas été faite, en particulier pour les formations Sciences Sociales – Droit, Sciences Economiques et Gestion, AES et Sciences Politiques – qui contrairement aux Sciences Humaines, ne sont que partiellement étudiées par le rapport.

Quatre thèmes abordés par le rapport ont particulièrement retenu notre attention.

Une Licence plus généraliste

L’UNEDESEP soutient la proposition d’une première année plus généraliste, ce qui suppose de repenser la propédeutique en Licence. Elle serait également l’occasion pour l’étudiant de pouvoir s’orienter plus facilement via des systèmes de passerelles, diminuant le taux d’échec en Licence dû à une mauvaise orientation.

La mise en place du Plan Réussite en Licence a relancé les débats en matière de formation et de pédagogie, ce qui était nécessaire pour les formations en SHS.

L’UNEDESEP rappelle cependant qu’il est impératif que les établissements développent en parallèle des indicateurs fiables vis-à-vis des dispositifs existants en Licence, pour avoir des retours précis sur les bonnes pratiques mises en place. Or, la création de ces indicateurs, véritables outils de pilotage d’une stratégie de formation, demeure exceptionnelle.

La mission d’orientation et d’insertion professionnelles des universités

L’UNEDESEP salue l’intérêt que les membres du Conseil ont porté sur les questions de l’orientation et l’insertion professionnelle, talon d’Achille des formations en SHS.

L’UNEDESEP souligne la nécessité de rendre les formations cohérentes avec le tissu socio-économique de la région.

Ceci est d’autant plus nécessaire que la mise en place des PRES fait naître des logiques de régionalisation, en particulier pour les formations en AES dont les débouchés professionnels dans les collectivités territoriales et dans les entreprises régionales sont les plus importants.

Enfin, il est nécessaire que dès la Licence 2, les formations en SHS offrent à l’étudiant tous les outils pour s’adapter de manière autonome à son métier alors que la société contemporaine est en perpétuelle transformation. L’UNEDESEP suggère la mise en place durant la Licence, d’un module obligatoire, consistant à effectuer un travail de recherche et de démarches professionnelles, pour l’établissement d’un projet fictif ou d’un mémoire, sanctionné par un jury regroupant des enseignants et des
professionnels.

La recherche

L’UNEDESEP, comme le préconise le rapport, encourage la professionnalisation des doctorats. Ceci peut prendre la
forme de stages inclus dans la formation ou par la multiplication de doctorats en partenariat avec les groupes de recherches des entreprises privées comme pour les conventions CIFRE par exemple.

L’évaluation des formations en SHS

L’évaluation des formations apparaît aujourd’hui comme un gage de reconnaissance de la qualité de la formation pour l’étudiant, mais aussi pour son employeur. À ce titre, il est nécessaire que les rapports délivrés par l’AERES soient davantage visibles des étudiants et des professionnels. L’UNEDESEP demande à ce que les notations AERES soient jointes aux maquettes de présentation des formations.

Enfin, le rapport ne traite pas du rôle primordial que les associations étudiantes peuvent jouer sur les campus et en parallèle des formations en SHS. Elles pourraient pourtant accompagner certaines propositions pertinentes du rapport telles que l’acquisition de compétences utiles pour l’insertion professionnelle, la participation à la création d’associations d’anciens, l’aide aux étudiants en SHS à la prise de conscience de la variété des débouchés qui s’offrent à eux…

Dans ce contexte, l’UNEDESEP souhaite que l’engagement dans les associations étudiantes en SHS soient davantage encouragé et reconnu par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche au niveau national, mais aussi par les directeurs d’UFR et les présidents des Universités concernées au niveau local.

Alexis DEBORDE

Etudiant à l’Université Paris-II

Président de l’UNEDESEP

presidence@unedesep.fr
06 42 98 77 25

Pour plus
d’informations: www.unedesep.fr

Evaluation des publications de gestion par Yves Soulabail

La rédaction de LaRSG, toujours soucieuse de participer au débat des idées, notamment dans le domaine de l’évaluation des publications de gestion, porte à votre connaissance des éléments de réflexion.

Un Message de Philippe Minard

Chers collègues,

On peut comprendre les réactions épidermiques du monde universitaire, fort malmené ces derniers temps, mais avant de lancer une guerre des principes, prenons quelques précautions :

– le monde de la recherche est internationalisé, et les pratiques d’évaluation existent; je ne crois pas que la tactique du village gaulois soit opportune, ni efficace;

– les classements de l’ERIH-ESF et ceux de l’AERES ne sont pas à mettre dans le même sac : en l’occurrence, l’AERES a “improvisé”, et n’a pas pris assez le temps d’affiner, de soumettre aux instances collectives (les sections du CN du CNRS, par exemple, auraient du être consultées). Or, l’élaboration de critères nécessite un large débat au sein de la communauté scientifique.

– plutôt que de refuser en bloc, et sans grande chance de succès, reconnaissons que :

1) notre profession passe son temps à “évaluer”; il n’y a là rien de tabou, et ce n’est pas neuf.

2) mais l’évaluation est une chose, et ses applications technocratiques en sont une autre: pour la clarté du débat, on gagnerait à distinguer entre les deux.

L’AERES a le tort, à mon avis, d’avoir voulu transformer directement et précipitamment en outil de gestion immédiate un instrument encore insuffisamment réfléchi.

Bref, autant je conteste moi aussi, à titre personnel, la procédure maladroite de l’AERES et ses résultats parfois absurdes, autant je demande qu’on évite de jouer une fois encore le psychodrame du “complot” des “méchants”.

Il faut plutôt avoir le débat; il est moins de principe que l’opportunité ; c’est aussi un débat technique, dans lequel il faut entrer : la bibliométrie peut donner le meilleur et le pire; il faut discuter sur pièces, sans diaboliser, qui les “informaticiens apprentis-sorciers”, qui les ” bureaucrates irresponsables”.

Le pire, pour la recherche française, serait l’immobilisme, auquel nous entraîne, à mon humble avis personnel, l’actuelle coalition des conservatismes de tous bords.

Le grand refus outragé, c’est la politique de la chaise vide, qui conduit de fait à laisser dessaisir la communauté scientifique d’un enjeu majeur.

Très cordialement,

Philippe Minard
Université Paris-8
(IDHE, UMR 8533-CNRS), et EHESS-Paris

Réponse de Sylvain Piron

Chers collègues,

Après en avoir pris connaissance avec retard, je réagis au message de Philippe Minard. Sur un ton qui évoque irrésistiblement la langue de bois sarkozienne (“Le pire… serait l’immobilisme… auquel nous entraîne… l’actuelle coalition des conservatismes de tous bords”), son message enfile les contre-vérités et les caricatures, sans fournir le moindre argument ni la moindre analyse pertinente sur la question.

Personne, si ce n’est lui, ne parle d’un “complot des méchants”. Il est vrai qu’une autre pétition circule, aux formulations plus agressives, mais celle dont il est question ne peut aucunement être lue comme une remise en cause du principe même de l’évaluation.

Cette démarche n’a rien de franco-française ; elle est ouvertement internationale puisqu’elle appelle les responsables de revues scientifiques à suivre la démarche de nos collègues d’histoire des sciences qui demandent à l’ESF de retirer les titres de leurs revues du classement ERIH.

Elle a d’autre part, à l’échelle française, une certaine chance de succès puisque l’AERES a déjà accepté de renoncer à produire un classement des revues en lettres, et qu’il ne serait pas déshonorant pour elle de reconnaître que sa démarche, précipitée et mal conduite, doit être au moins suspendue. En outre, les discussions et échanges d’informations qu’a suscités cette initiative nous a permis de découvrir que, dans toutes les disciplines, le recours à une évaluation mécanique fondée sur un classement des revues est contesté. A titre d’exemple, le texte joint, de Nancy Adler et Anne-Wil Harzing (auteur du fameux logiciel “publish or perish”), montre les dégâts causés dans le domaine de la gestion.

J’invite donc tous ceux d’entre vous qui ne l’ont pas encore fait à signer l’appel au retrait de la liste des revues de l’AERES.

Et puisque cette démarche s’inscrit dans un mouvement plus vaste de résistance à la politique scientifique du gouvernement, je vous invite également à lire et signer un message de SLR appelant à suspendre toute participation aux expertises de l’ANR et de l’AERES http://www.sauvonslarecherche.fr/spip.php?article2147

Quant à Philippe Minard, puisque son message n’est au fond qu’une justification de son choix d’occuper les chaises que nous laissons vides, souhaitons qu’il se fasse l’écho de préoccupations qu’il dit partager, au moins pour ce qui est du classement absurde des revues.

Bien cordialement,

Sylvain Piron
EHESS

Lettre adressée à l’AERES, aux présidences d’université et au CNRS

Lors de la vague D des quadriennaux universitaires, les dossiers de demande de reconnaissance d’unité de recherche ont été remaniés pour prendre en compte les
nouvelles procédures d’évaluation de l’AERES. Ils contiennent une nomenclature détaillée de présentation des productions scientifiques des membres de l’unité soumise à évaluation. Celle-ci repose
d’une part sur un classement des revues en catégories ABC établis avec l’European Reference Index for the Humanities selon des critères opaques, de l’autre sur la distinction des types de travaux
issue des pratiques des sciences médicales et physiques. À cette occasion, des critiques ont été émises contre une évaluation strictement quantitative de la recherche, l’inadéquation des critères
identiques d’évaluation à tous les champs scientifiques et le manque de transparence dans lequel s’est effectué le classement des revues.

Un certain nombre d’initiatives ont été prises contre ces nouvelles formes d’évaluation de la recherche, notamment une
pétition (www.appelrevues.org) que nous avons individuellement signée et qui rappelle les termes du débat et les
raisons de notre opposition.

Soucieux de répondre avec le maximum d’efficacité et de clarté aux demandes de renseignements utiles à une évaluation en
phase avec les pratiques des différentes disciplines des sciences humaines et sociales, et pour mettre en accord nos pensées et nos actes, nous sommes solidaires de l’attitude déjà adoptée par
plusieurs centres de recherche, comprenant des chercheurs et enseignants chercheurs, comme par nombre de nos collègues à titre individuel. C’est ainsi que nous refusons le classement des
publications individuelles et collectives des unités selon les 13 rubriques proposées par les nouvelles procédures d’évaluation de l’AERES en dehors de toute logique scientifique.

Dans l’attente d’un réexamen du classement des revues selon des critères clairement définis, nous proposons, aujourd’hui
comme à l’avenir, que les unités adoptent un classement resserré des types de publications et ne renseignent pas les rubriques correspondant au classement des revues.

Françoise Blum (CNRS-CHS)

Michel Dreyfus (CNRS-CHS)

Pascale Goetschel (Paris I)

Marie-Claire Lavabre (CNRS-CEVIPOF)

Sylvie Lindeperg (Paris I)

Françoise Mayer (Montpellier II)

Nonna Mayer
(CNRS-CEVIPOV)

 

Denis Pelletier  (EPHE-GSRL)

 

Sylvie Schweitzer (Lyon
2)

 

Sylvie Thénault
(CNRS-CHS)

 

Rossana Vaccaro
(CNRS-CHS)

 

Fabrice Virgili
(CNRS-IRICE)

 

Danièle Voldman
(CNRS-CHS)

 

Annette Wieviorka
(CNRS-IRICE)

n°235 – Spécial rapport au président de la CGE

Cherchez ! Et vous trouverez !*”

par PhilippeNASZÁLYI

Directeur de la rédaction et de la publication

L’on dit souvent que notre revue est un peu trop académique pour les entreprises et les organisations. L’actualité nous montre qu’elles ont pourtant bien besoin d’analyser, comparer, réformer leurs modes de gestion dans un cadre respectueux de l’environnement et des cultures humaines. Nous ne cesserons de reprendre comme un « leitmotiv » cette sentence de deux remarquables universitaires américains qui, comme nous, déplorent que « les pratiques managériales ne font qu’un usage très limité des connaissances accumulées par la recherche en management1 ».

Si la crise pouvait enfin faire comprendre à ces gens trop pressés, trop accaparés, trop occupés, trop importants, trop pragmatiques, trop proches du terrain et les « mains dans le cambouis » qu’à force de négliger de se poser, pour réfléchir à la qualité de leurs entreprises, ils ont souvent conduit leurs organisations à la faillite et l’économie là où elle est, présentement.

La sagesse populaire depuis longtemps donne tort à ces activistes, « bourreaux de travail » qui pensent que l’agitation ou le temps occupé coûte que coûte sont signes de l’oeuvre. Antequam Agatis Cogitate, dit depuis Rome, le sens commun !

Beaucoup de nos faillis ou en passe de l’être, ont une vision péjorative de la pensée « académique » des universitaires, qu’ils pourraient comparer s’ils en connaissaient l’auteur, aux « êtres des nuées », qu’Aristophane « nomme » philosophes. Ce jugement nuit gravement à la transformation devenue inéluctable d’une économie en crise, n’en déplaise à ces butors.

Comme Károly Polányi, nous estimons plus que jamais que c’est l’innovation sociale qui peut remettre la société et donc l’économie qui lui est incluse, en état. On ne peut désormais qu’adhérer à cette vision « austro-hongroise », qui nous est personnellement douce, et qui constatait déjà en 1944, que le marché autorégulé « ne pouvait exister de façon suivie sans anéantir la substance humaine et naturelle de la société, sans détruire l’homme et sans transformer son milieu en désert2 ».

Nous y sommes.

C’est donc tout naturellement que notre revue, au sens large que nous donnons au mot de gestion, depuis 1965, direction et gestion, ou celui encore plus large qui lui vient par sa racine latine du supin du verbe : gero, is, ere, gessi, gestum« s’occuper de » qui trouve donc tout naturellement sa vocation, dans le contexte d’appréhender l’activité humaine dans sa complexité au service du seul sujet qui vaille : l’Homme.

Ce n’est pas grandiloquence que de l’écrire et de le répéter, c’est cette conviction qu’il faut souvent réinsuffler devant le matérialisme
destructeur qui conduit vers les « offres d’une amélioration économique non dirigée » pour reprendre encore l’idée de Károly Polányi3.

Là encore, nous y sommes !

Dans l’introduction du numéro qui clôturait l’année 20084, nous voulions placer 2009, qui s’ouvre avec sa cascade de cataclysmes environnementaux, financiers, économiques et sociaux, sous le signe des propositions que politiques et « experts », au discours usé jusqu’à la corde, sont incapables même d’envisager, en dehors des sentiers battus et des recettes inopérantes.

Cette force de propositions ne peut se fonder que sur la réflexion profonde, sur les bases ou les fondements d’une nouvelle « recherche
susceptible de déboucher sur des productions de richesses nationales disruptives, économiquement exploitables et créatrices d’emplois
5 ».

Parce que les Grandes écoles sont en France, un élément constant de la formation supérieure et cela depuis le « siècle des Lumières », on l’a souvent oublié ; Parce que les Grandes écoles, organisées, variées, souvent plus démocratiquement ouvertes qu’on ne le dit, à la formation sont un membre de l’« Universitas » au sens générique que nos partenaires ou concurrents, y compris l’inénarrable « Classement de Shanghai », placent sous le vocable d’université ; Parce qu’enfin, les Grandes écoles participent, dans une mesure qu’on connaît souvent mal, à la « Recherche » au sens générique que lui donne notamment le processus de Bologne auquel notre revue entend activement et pleinement participer et sa déclinaison euro méditerranéenne de Barcelone ; nous avons choisi de consacrer ce premier numéro de 2009 à la publication du rapport sur à la Recherche « dans les Grandes écoles et ailleurs », dans le cadre de l’analyse de l’existant, mais aussi de la prospective originale d’une « recherche plus autonome, plus inventive et plus entrepreneuriale6 », qui correspond bien à la volonté novatrice permanente des sciences de gestion au service des organisations humaines.

Ce rapport à lui seul interroge profondément notre société qui ne veut toujours pas remettre en cause ses modes sociaux et par le fait même, réellement l’organisation de la formation et son corollaire qu’est la recherche.

« La République n’a pas besoin de savants ! »

Nos lecteurs savent que, comme l’apôtre Paul, nous pensons qu’il faut sans cesse rappeler que des réformettes ne font pas évoluer d’un pouce une  société en panne de sens. « Interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, mais avec une grande patience et avec le souci d’instruire7 »

Il y a quelques années, nous avions marqué notre réprobation des modèles d’évaluation de la science en reprenant ce mot terrible de président du tribunal révolutionnaire à Lavoisier : « La République n’a pas besoin de savants !8 ».

Plus que jamais, et paradoxalement mais en apparence seulement, nous faisons nôtre aujourd’hui, cette phrase apparemment barbare, « La République n’a pas besoin de savants ! ». Nous n’avons effectivement pas besoin de ces savants qui comme Scott Reuben, surnommé comme l’escroc de la finance, « Dr Madoff » par les
Américains qui ont, semble-t’il, pléthore de ces hommes bien intégrés dans leur système, et truquent leurs publications pour obtenir, subventions pour leurs labos, honneurs et récompenses pour eux-mêmes. « Tel a été le sujet du dernier rapport publié en 2002 par l’Académie américaine des sciences : « Integrity in Scientific Research : Creating an Environment that Promotes Responsible Conduct9 ». Ce dernier rapport insiste non seulement sur la pratique de laboratoire, mais aussi sur la nécessité de gérer les hommes et de trouver des financements, deux aspects sources de conflits entre les financeurs et les chercheurs10 ».

Qu’on ne nous dise pas qu’il s’agit d’abus, dans la lignée du Coréen Hwang Woo-Suk, prétendu auteur du clonage humain en 200411ou du célèbre physicien allemand Henrick Schön12. Tous ces « savants », tous ces chercheurs ont été sélectionnés par NatureScience ou Applied Physics Letters, qui font autorité dans ce monde si « calibré » de la Recherche scientifique avec un grand « R ». Ce monde qui joue avec les « marchés ». Ces initiés qui répondent aux critères de Shanghai lesquels sont désormais la seule référence pour ceux qui ne croient qu’en une évaluation quantitative. Ils tiennent pour le malheur de la Recherche, le haut du pavé, encore !

La communauté scientifique peut bien nous montrer, avec raison pour partie, que l’abus a toujours existé et que le faussaire Vrain-Lucas, escroqua le grand mathématicien Michel Chasles et par lui, ridiculisa toute l’Académie des Sciences en sa séance du 8 juillet 186513. C’est le processus même sur lequel repose la « sanctification scientifique » qui est mis à mal, avec les implications sociétales que cela entraîne. L’un des points qui animait le patriote Chasles dans cette correspondance hallucinante qu’il acheta au faussaire, et présenta à ses pairs, tenait en cet espoir de pouvoir attribuer au « Grand Pascal », l’idée de la gravitation plus de vingt ans avant Newton.

Pour des raisons mercantiles et non patriotes, il fallut une négociation au niveau le plus élevé de l’État, pour que les Français au même titre que les Américains se voient attribuer, la découverte du virus du SIDA en 1983.

C’est dire que s’approprier la découverte ou plus simplement la pensée de l’autre ne peut que se banaliser dans cet univers. La raison financière du système même de l’évaluation et donc du fonctionnement le provoque inexorablement.

Ces pratiques frauduleuses sont désormais étroitement intégrées par le mécanisme même de la Recherche et ne sont plus qu’en apparence des faits personnels délictueux. La logique même de leur commission des actes est donc devenue d’une tout autre nature. C’est le plagiat qui se multiplie comme le démontre l’enquête auprès de 127 rédacteurs en chef de revues économiques anglo-américaines14 (celles-là même que l’AERES, à la suite de la section 37 du CNRS, classe en rang A, pour évaluer les chercheurs français et leurs équipes, leur accorder en vertu de la législation récente, les équipements, les postes et les financements !).

Ce choix d’évaluation des chercheurs et de classement des laboratoires et des centres de recherche est donc pas nature idéologique ou pire, fondé sur la méconnaissance de tout ce qui n’est pas anglo-américain. C’est une négation de ce qu’est l’Europe en devenir, négation de l’espace euro-méditerranéen qui nous concerne tant ou négations des mondes latins des Amériques, pour ne retenir que de proches et nombreux parents qui ont des modèles de pensée et de management originaux. La preuve nous est assénée même, par l’introduction du rapport de la section 37 du CNRS15 dont les conclusions de classification des revues ont été plagiées et de la pire sorte qui soit, par l’AERES : « Nous n’ignorons pas qu’il existe des revues excellentes publiant en allemand, espagnol ou italien et il est parfaitement légitime pour un chercheur d’y publier. Cependant la section ne s’estime pas compétente pour procéder au classement de telles revues ».

Ces pratiques totalitaires rappellent les capitulations idéologiques qu’il ne faut pas hésiter à rapprocher des heures sombres de notre histoire par la « collaboration » de certains intellectuels avec le vainqueur apparent d’alors.

On retrouve toujours cette perte du sens qui traverse l’Histoire, et justifie sans cesse, le titre de l’ouvrage bien connu de Julien Benda :
« La trahison des clercs ».

Bien plus encore, l’ignominie le dispute au ridicule, lorsque l’on peut trouver après le calcul automatique des étoiles (a-t’on d’ailleurs
besoin d’un « expert » pour cela ?) des qualifications qui font rire partout : enseignant « non-publiant » (car pas dans une revue anglo-américaine), mais « publiant » car ayant commis de nombreux articles sélectionnés dans d’autres revues de qualité à comité de lecture et ne figurant pas la plupart du temps, dans la « liste officielle publiée par le Kominterm »… Il convient que nos lecteurs étrangers se délectent de ces perles qui auraient ravi Gogol ou Courteline, voire Alfred Jarry.

Le drame toutefois, est qu’il s’agit de la Recherche en France et que le sujet, comme son développement ou sa promotion, mériterait mieux que ces évaluations indispensables, compte tenu des abus manifestes de certains enseignants-non chercheurs, mais qui demeurent partielles pour ne pas dire partiales, et en tout cas, sectaires. Espérons que nous serons entendus en « haut-lieu », car si les « historiens16 » ont su faire évoluer le système naissant, avec intelligence, nos disciplines, faute d’organisations crédibles ou indépendantes des financiers et des pouvoirs publics qui emploient beaucoup de leurs représentants, sont livrées aux palinodies mercantiles des trissotins mandatés.

Si comme le déclare au Monde17, le président du comité d’éthique de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), Jean-Claude Ameisen, il faut « Valoriser l’intégrité et pas seulement la compétition », il y a fort à faire alors, avec les critères quantitatifs des dignes héritiers de la pensée positiviste du XIXe siècle qui sied tant aux libéraux. Cette bibliométrie imposée comme évaluation aux chercheurs français qui protestent à juste titre contre ses critères d’un autre âge, illustre une idéologie dont tout montre chaque jour qu’elle se meurt, qu’elle est morte, parce que fondamentalement inepte et inefficace18.

Un des disciples de Raymond Barre nous rapportait, il y a peu à Nice, la réflexion de celui qui fut le « 1er économiste de France » et s’estimait heureux dans sa vie d’avoir publié huit articles contenant au moins une idée originale. « Vaut-il mieux un chercheur qui a découvert une seule idée brillante publiée dans un seul article, mais qui est beaucoup cité ? Ou bien un chercheur qui a publié d’innombrables articles, mais qui ne sont cités chacun, qu’une seule fois19 ? ».

La reproduction à l’infini sous forme de citations, dans un « facteur h », appuyé sur des calculs incontrôlés, invérifiés et invérifiables de trois moteurs de recherche20 ne peut répondre non plus, de manière satisfaisante à des critères sérieux d’évaluation. 40 % seulement des données de ces moteurs de recherche sont communs ; que fait-on des 60 autres % pour constituer l’évaluation ?

Quant aux homonymies innombrables dans les revues à l’américaine qui ne citent que le nom propre des auteurs, elles viennent atténuer encore la fiabilité des systèmes de reconnaissance des auteurs cités. Nos lecteurs auront remarqué d’ailleurs que La RSG, plus rigoureuse en la matière, demande à ses auteurs de préciser au moins la 1re lettre du prénom dans chaque citation d’auteur, afin de lutter contre ce fléau qui rend ascientifique tous les autres modèles pourtant cotés A.

Ces évaluations sont pourtant nécessaires voire indispensables. Un maintien du système actuel ou sa généralisation par des commissions « d’experts » élus du fait de leur appartenance à un syndicat, serait à coup sûr une régression, même si certains, à l’instar du CNU21, le souhaitent pour rester dans les petites combines d’appareils, les marchandages des mandarins et les copinages22 plus ou moins locaux qui ruinent au yeux de tous, et d’abord des politiques, souvent très injustes, car ignorants des réalités, l’excellence de bien des domaines de la cinquième Recherche du monde.

L’évaluation demeure donc bien compliquée à rendre signifiante et « le jugement des pairs » qui parfois semble la panacée pour certains, « peut » comme aime à le dire notre tout récent Prix Nobel de médecine, Luc Montagnier, « être aussi très sclérosant et empêcher l’innovation23 ».

L’exemple de la résistance de l’Académie de médecine aux idées novatrices de Pasteur est là pour rappeler à tous, la grande modestie qu’il convient d’avoir en ces domaines où certitude règne souvent avec intolérance, conservatisme et étroitesse d’esprit. La pensée officielle est tout aussi annihilante pour la Recherche, qu’elle peut
être génératrice de progrès lorsqu’elle signifie volonté politique et mise en place de moyens adaptés, comme ce fut le cas en France, notamment pendant la période gaullienne. C’est sans doute là
que le bât blesse le plus, aujourd’hui.

La planification a disparu, et avec elle, l’expression d’une alliance entre le possible à moyen et long terme, préparé par des experts
qualifiés, et les moyens mis à disposition par la volonté politique démocratiquement élue. La petite comptabilité de boutiquier qu’on veut imposer à la Recherche au nom de la démocratie qui demanderait des comptes à ceux qu’elle finance, tente (mal) de masquer « l’insuffisance de méthodologie pour l’élaboration de la stratégie et le défaut d’implication du Gouvernement, qui se traduisent par l’absence de choix prioritaires24 ». Que ce soit au niveau des choix scientifiques ou technologiques, comme pour ceux des autres disciplines, notamment celles de l’homme et de la société, « l’insuffisance institutionnelle dans le pilotage de la recherche » est patente.

Elle témoigne de l’absence de structure « chef de file » plutôt interministérielle et au moins rattachée à la tête de l’Exécutif, pour
éviter que le rapport gouvernemental comme le démontre l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques, ne soit « qu’un panorama exhaustif de l’ensemble des pistes suivies », au lieu d’être « un instrument d’orientation entérinant une volonté publique ».

Si « l’homme d’avenir a bien les yeux tournés vers le passé », comme le disait en substance, Ernest Renan, un autre pourfendeur du Comtisme si nuisible et si répandu dans nos classes dirigeantes internationales, la remise au goût du jour, dans une sorte de morbidité sclérosante des recettes passées, par absence totale de courage, d’ambition et d’espérance, est le crime par excellence, celui de la faute (ou du péché) contre l’esprit, celui qui dans ce monde, comme un autre, demeure irrémissible.

L’espérance est notre conviction et nous incite à placer en exergue de ce très talentueux et original « Rapport de la commission recherche
et transfert à l’attention du Président de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) »
cette sentence qui pourrait aussi bien être inspirée par celle que Platon pense être la mère du « passage25 » ou celle à laquelle Hésiode attribue la qualité de savoir « plus de choses que tout dieu ou homme mortel26 », Métis qui figure en titre de l’étude que nous avons choisie pour constituer ce numéro : « Qui cherche trouve27 ! »

* Luc 11 – 9.

1. http://dx.doi.org/10.1051/larsg:2007048, Jeffrey Pfeffer et Robert Sutton, « Hard Facts, dangerous
half-truths & total nonsens Harvard Business School Piess.
2006. Faits et Foutaises dans le Management » traduction de l’américain par Sabine Rolland, Editons Vuibert, Pans 2007. 255 pages. Présentation de l’édition française par Hervé Laroche, professeur de stratégie et management à l’ESCP-EAP. Paris.

2. Polányi Károly, La Grande Transformation (1944), Gallimard, Paris, 1983, 420 pages, page 22.

3. Polányi Károly, La Grande Transformation (1944), Gallimard, Paris, 1983, 420 pages, page 60.

4. http://dx.doi.org/10.1051/larsg/2008051 ; Ph. Naszályi : « nous pensons développer les termes de la Recherche et de l’innovation qui sont
un volet fondamental, après le travail, d’une refondation du système économique et social, dans les numéros à venir »
, Consummatum est ! Numéro 234, novembre-décembre 2008, page 5.

5. Cf. page 19 de ce numéro.

6. Cf. page 20 de ce numéro.

7. Paul, apôtre, Lettre à Timothée, 2 Tm 3 – 14 – 4.

8. http://dx.doi.org/10.1051/larsg:2005040, Philippe Naszályi, La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion, n° 216 (2005) 5-9 DOI : 10.1051/ larsg : 2005040

9. National Academy of Science, Responsible Science : Ensuring the Integrity of the Research Process,
Washington, 1992. p. 37.

10. Girolamo Ramunni, « La fraude scientifique », La Revue pour l’histoire du CNRS, N° 9 — novembre 2003, mis en ligne le 30 octobre
2006. URL : http://histoirecnrs.revues.org/document566.html. Consulté le 12 mars 2009.

11. Jacques Testart, « L’affaire Hwang Woo-suk ou les dérives de la sciencespectacle », Le Monde, 4 janvier 2006.

12. « Dark Secret of Hendrik Schon », Physists and Physicists, 29 th september 2006.

13. G. Lenotre, « L’affaire Chasles ou l’arnaque Vrain-Lucas ou Comment escroquer un membre de l’Institut de France », Historia n° 57, août 1951.

14. Thomas Bartlett and Scott Smallwood Four Academic Plagiarists You’ve Never Heard Of : How Many More
Are Out There ? Chronicle of Higher Education, 2004, december 17.
http://chronicle.com/free/v51/i17/17a00802.htm (consulté le 15 mars 2009).

15. Denis Bouyssou, Introduction à Catégorisation des revues en Économie et en Gestion Section 37 (Économie / Gestion) du Comité National de la Recherche Scientifique (CNRS), Octobre 2007, page i.

16. La forte réactivité des historiens notamment, a permis une révision des classements de revues par l’AERES pour tenir compte des la qualité réelle.

17. Le Monde, 21 mars 2009, page 20.

18. Nos lecteurs liront avec profit : « Petits conseils aux enseignants-chercheurs qui voudront réussir leur évaluation ». http://contretemps.eu/interventions/petits-conseils-enseignants-chercheurs-quivoudront-reussir-leur-evaluation.

19. Maya Beauvallet, « Les Stratégies absurdes. Comment faire pire en croyant faire mieux » Éditions du Seuil – La Martinière, 150
pages, Paris 2009.

20. Google scholar, WoS et Scopus.

21. CNU, Conseil National des Universités. C’est l’instance nationale compétente en France à l’égard du recrutement et du suivi de la carrière des enseignants-chercheurs. Il est composé de 77 sections représentant les discipline, qui sont élues qui désignent en son sein un Bureau : président, vice-président…

22. http://dx.doi.org/10.1051/larsg:2007031 ; « Graecia capta ferum victorem cepit… ou « Messieurs, il est cinq heures, le cours est terminé
»
, Philippe Naszályi, La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion, n° 226-27 (2007) 5-10 DOI : 10.1051/larsg : 2007031, page 9.

23. Entretien de l’auteur avec Luc Montagnier aux Etats généraux des CCI (Chambres de Commerce et d’Industrie) : 1resrencontres à Evry sur l’Innovation, 4 juin 2008.

24. Claude Birraux et Christian Bataille : « Rapport sur l’Évaluation de la stratégie nationale de recherche en matière d’énergie », enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale, annexe au procès-verbal de la séance du 3 mars 2009. Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques.

25. Platon, Le Banquet.

26. Hésiode, Théogonie.

27. Luc 11 – 10.