Voilà bien un titre court et énigmatique pour l’éditorial du deuxième Telle est l’ambition que se propose de traiter une théorie d’auteurs – 21 pour 8 articles – qui apporte la diversité culturelle de la pensée francophone à laquelle nous consacrons une tribune et des informations particulières (page 27). Cette théorie de chercheurs comme toujours dans notre revue, n’exprime évidemment pas une recherche désincarnée ou théorique à l’excès.
par Philippe Naszályi – Directeur de La RSG
Ouvrir tout grand les fenêtres nous a paru salutaire
L’enfermement qui guette la science de gestion dans notre pays n’est pas seulement dû aux différents confinements imposés au prétexte d’un prétendu souci de la santé. Il se vit chaque jour par la soumission que tentent d’imposer les différentes autorités pour se conformer aux dogmes économiques. Ce qui se passe dans la recherche française aujourd’hui est la simple et triste reproduction de ce qu’ont vécu les universitaires américains constate pour le déplorer, Fabrice Rousselot, directeur de The Conversation[1].
Plus encore, nous rejoignons ainsi en cela la dénonciation de Roland Gori qui remarque que dans nos sociétés de contrôle, l’information est devenue le moyen de surveiller, de normaliser et de donner des ordres aux populations, au point que les individus se trouvent réduits à n’être que les supports de ces informations[2].
Citer ici, cet éminent enseignant de l’Université d’Aix-Marseille, c’est aussi rappeler que la cité phocéenne est un haut lieu du brassage des populations méditerranéennes. Nombre des auteurs de ce numéro sont issus de cet espace, au sens que Fernand Braudel donne à ce terme, qui est francophone pour l’essentiel.
Citer ici, ce professeur honoraire de psychopathologie clinique nous permet un clin d’œil à un autre illustre chercheur en santé de cette université et qu’il présida même, Didier Raoult.
Qu’on se rassure notre revue n’a pas décidé de remplacer TheLancet, atteint il y a peu dans sa crédibilité, là encore pour satisfaire aux normes de la pensée conforme, mais qui s’est avérée finalement fausse[3] !
Nous pensons en effet que ce médecin a réussi à imposer des débats épistémologiques qui ne devront pas s’éteindre. Il n’y en effet, pas une seule façon de penser et de faire de la recherche. Accepter de laisser mourir des êtres humains, – ce qu’acceptent par principe des études randomisées – en donnant un placebo au lieu d’un traitement, rappelle les pires moments de la recherche médicale, n’en déplaise aux thuriféraires (souvent stipendiés) de cette dérive déconnectée de l’expérimentation pharmaceutique plus que médicale !
C’est dans cet esprit que Gilles Paché, éminent auteur de notre revue et lui aussi professeur dans cette université qui unit deux illustres villes, l’une romaine, Aix, l’autre grecque, Marseille, apporte également sa pierre à notre ambition d’ouvrir la science de gestion. Une note de lecture synthétique et percutante comme il en a le secret, présente un ouvrage majeur : Libres d’obéir, le management du nazisme à aujourd’hui (page 139).
Pour couronner ce choix éditorial, il m’est apparu évident de placer comme une sorte d’exergue cette remarquable réflexion de Rémy Février : De la légitimité des sciences de gestion dans l’étude des organisations terroristes : L’exemple de l’état islamique (page 12). Bien sûr, comme toute thèse, elle ouvre le débat et j’avoue que j’ai dû arbitrer entre plusieurs avis des évaluateurs que je ne saurais encore une fois remercier pour leur travail complet et divers.
Débattre, n’est-ce pas le principe même de la recherche ? C’est le rôle des revues académiques que de promouvoir l’avancement d’une discipline en diffusant les résultats de la recherche et en encourageant les débats sur les théories[4].
Alors n’ayons pas peur de proposer de “Renouveler la pensée en sciences de gestion !”
1. Débat : Accomplir un acte de recherche, qu’est-ce que ça veut dire ?21 février 2019, https://theconversation.com/debat-accomplir-un-acte-de-recherche-quest-ceque-ca-veut-dire-112036
2. Roland Gori, La Fabrique de nos servitudes, éditions LLL à paraître janvier 2022.
3. Le 22 mai (2020), la prestigieuse revue “The Lancet” publiait une étude sur les méfaits de l’hydroxychloroquine pour soigner la COVID-19. Dans la foulée, le gouvernement français décidait de ne plus autoriser la prescription de cette dernière contre la Covid-19, hors essais cliniques. Depuis, trois des quatre auteurs de l’article se sont rétractés. Comment The Lancet est-il passé de la gloire aux déboires ? Guillaume Erner ; “Superfail”, 7 juin 2020, https://www.franceculture.fr/emissions/superfail/le-lancet-une-etude-de-malades
4. Marcia Finlayson, Une invitation à la discussion et au débat, Canadian Journal of Occupational Therapy (Vol. 76, Issue 1), février 2009.
Voilà bien un titre court et énigmatique pour l’éditorial du deuxième numéro de 2021, numéro double de nouveau pour réunir en un seul numéro une matière dense et riche sur le thème du numérique justement !
par Philippe Naszályi – Directeur de La RSG
56, ce n’est ni pour expliquer ce qu’est un nombre tétraédrique ou nombre pyramidal triangulaire[1].
ni a fortiori en référence au nombre de signataires de la Déclaration d’Indépendance des États-Unis, même si l’on compte parmi eux, l’illustre Benjamin Franklin.
56, c’est tout simplement l’âge de notre revue en cette année 2021.
Ordinairement, on ne fête pas spécialement cet âge-là qui n’est ni 50, ni 60, ni même 55 ! Mais, nos lecteurs fidèles et attentifs auront peut-être remarqué que, troublés par la crise Covid, notre composeur et donc nous-mêmes, avons continué en 2020 à numéroter notre revue comme en 2019 : 54e année !
Ainsi, passons-nous directement de 54 à 56, comme si 2020 avait été mise entre parenthèses, une sorte d’an 0, comme pour notre ère qui passe de moins 1 avant J.-C. à plus 1 après J.-C.
Redevenons sérieux !
2021 est pour notre revue une année de réflexion sur ce que nous sommes ! Le précèdent numéro avait été confié comme vous l’avez vu, a deux éminents universitaires, éditeurs[2]. Le Comité éditorial a confié celui-ci à un spécialiste de La gestion des organisations à l’ère numérique[3]. C’est lui qui a rédigé l’éditorial et dirige ce numéro ! Le prochain comprendra un fort dossier composé par des auteurs internationaux et introduit par un article validé par d’éminents spécialistes de la « chose internationale » !
Notre revue a choisi depuis 1965, un chemin fondé sur l’originalité, la qualité et l’ouverture, toutes choses qui ne vont pas avec l’académisme ambiant et le confort du conformisme à la mode !
Nos structures découlent de ces choix, voilà pourquoi nous invitons nos lecteurs à se reporter à la page 2 de couverture qui a changé dès le 1er numéro de 2021 et qui présente ce que nous sommes et quelles sont nos particularités dans la presse de recherche.
Même en ce domaine, nous nous devons d’assurer notre mission de pédagogues tant sont inconnues ou méconnues les obligations qui découlent de notre statut d’entreprise de presse, tant sont inconnus ou méconnus nos choix quant à la qualité des sources et des références, tant est inconnue ou méconnue notre implication dans une recherche originale et internationale qui valorise la francophonie sans ignorer la dimension multiculturelle des sciences de gestion.
Pour évaluer et apprécier, il faut au moins avoir les compétences, c’est-à-dire les connaissances du monde de l’édition de presse et être au moins du même niveau de qualité !
Car évidemment notre souci de l’intérêt général est bien d’éviter qu’ils aient « des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas[4] ! »
1. Selon Wikipédia, il s’agit d’un nombre figuré qui peut être représenté par une pyramide de base triangulaire, c’est-à-dire un tétraèdre, dont chaque couche représente un nombre triangulaire !
2. Brédart Xavier, Séverin Éric, « Regards croisés sur l’échec et la défaillance », La Revue des Sciences de Gestion, 2021/1 (n° 307), p. 11-13. URL : https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2021-1-page-11.htm.
3. Olivier Mamavi est Directeur des données en charge des challenges numériques chez Management & Data Science. Mamavi, Olivier, et al. « Chapitre 17. Data science et sciences de gestion : enjeux méthodologiques et pratiques », Soufyane Frimousse éd., Produire du savoir et de l’action. Le vade-mecum du dirigeant chercheur. EMS Éditions, 2020, pp. 197-207. […]
Puisque tous ceux qui se pensent importants, utilisent le « globish », cette langue grégaire, née dans les bas-fonds des boutiquiers, poursuivons notre retour au latin. Excidere, c’est-à-dire « tomber » est le thème dominant de ce premier numéro de 2021. Toute la richesse des problématiques traitées, découle de ce mot qui désigne tout à la fois ce qui vient du sort et du hasard, de l’action malencontreuse comme de la volonté, de la faute morale comme du fruit des circonstances ou de l’environnement… en résumé, en provenance des hommes et des dieux !
Échéances si chères aux financiers comme aux politiciens et déchéances plus propres aux moralistes et aux juristes sont les filles d’échoir, venu du latin populaire excadere, tout comme du classique excidere : tomber !
Comprendre les échecs, qui ne sont pas qu’un jeu d’attention et de logique, est bien un thème fondamental en sciences de gestion. « Loin d’être un événement rare qui n’arrive qu’aux autres, la défaillance et sa forme la plus extrême, la faillite, touche toutes les organisations. L’échec affecte non seulement les conditions de vie des salariés mais aussi les économies de villes et de régions entières et leur tissu social » écrivent avec raison Xavier Brédart et Éric Séverin dans l’introduction au dossier dont ils ont accepté d’être les « éditeurs associés » (page 11).
Ces années COVID, car on peut désormais les appeler ainsi, n’ont pas encore apporté leurs lots de défaillances et de faillites qui devraient découler de cet arrêt ou de cette décélération brutale des économies, en proie à la pandémie.
Beaucoup de gouvernements dont, et ce n’est pas le moindre, celui d’Allemagne, ont jeté aux orties une partie des dogmes malthusiens issus du monétarisme qui sévissait depuis M. Thatcher et R. Reagan. On ne sait toutefois pas comment se produira cet « après-covid » qui tarde à venir : retour aux mesures drastiques, terme venu de la pharmacopée purgative et si cher aux néolibéraux ou « nouveau monde » au contour encore plus incertain qu’il n’est souvent qu’un eldorado de la dette infinie ou une utopie !
Laissons aux économistes le soin de proposer des solutions pour « l’après », d’autant que les français se sont dotés depuis octobre 2020 d’un Comité de Datation des Cycles de l’Économie Française (CDCEF)[1] qui, de l’analyse du passé pourrait permettre de mieux appréhender l’avenir.
Nous y reviendrons dans un numéro prochain. Il est désormais permis de rêver qu’empruntant enfin à l’histoire sa sagesse, comme le font depuis longtemps les bons gestionnaires, les économistes puissent apporter des propositions voire une méthode, plutôt que les certitudes dogmatiques.
Celles qu’ils nous ont assénées depuis des lustres, notamment celles des prétendus Nobel, sectateurs sectaires du mainstream, en inspirant les politiques publiques, ont conduit régulièrement dans des culs-de-sac avec leur lot de pauvreté, d’inégalités et de régression !
Pour ce qui concerne la France, nous ne redirons jamais assez[2] combien la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) de 2001, et, mais pas seulement, la désastreuse révision générale des politiques publiques (RGPP) appliquée de 2007 à 2012, sont mortifères pour nos services publics notamment ceux de la santé, mais aussi de la recherche.
Citons à l’appui une parole d’expert, en l’occurrence une experte, Suzanne Maury qui sur le site même de Vie publique déclare : « La démarche d’évaluation des politiques publiques mise en place par la LOLF apparaît comme simpliste et la “culture de la performance” censée en résulter est peu à peu devenue une simple formule, d’autant que la LOLF s’est traduite pour les services déconcentrés par la nécessité d’alimenter un système d’information lourd et peu utilisé[3] ». On ne saurait mieux qualifier ce que nous appelons un pays sous administré par une bureaucratie pléthorique, tentaculaire et d’autant plus arbitraire qu’elle ne sait à peu près rien des réalités sur lesquelles elle exerce son autorité.
Même en coupant le cou à l’une des innombrables fausses études que véhiculent sans les vérifier, hommes et femmes politiques pour apparaître experts et « journalistes » qui ont oublié leur manuel de déontologie en ne vérifiant pas leurs sources, on ne peut, comme le remarque fort justement, Serge Besanger[4], que constater qu’ « il y a donc à la fois trop de postes administratifs, déclarés ou non en tant que tels et trop de tâches administratives déléguées au personnel soignant et coûtant trop cher » dans les hôpitaux français, lorsqu’un médecin comme au CHRU de Nancy, consacre plus de 30 % de sa journée de travail à des tâches administratives[5] !
Effectivement, « Le bilan de la LOLF est décevant » poursuit encore Suzanne Maury, et c’est même la Cour des comptes, « pourtant très favorable à ses choix de principe », (et pour cause puisque le Président de cette dernière, le socialiste Didier Migaud, est l’un des deux pères de cette réforme) qui l’écrit dès 2011[6] !
À aucun moment, ces tenants du NPM[7], n’ont compris que c’est leur mauvaise gestion, c’est-à-dire cette logique du « tout budgétaire » que dénonce même « France Stratégie », qui en est la cause[8].
À aucun moment, puisqu’ils n’ont rien appris d’autre dans leur formatage idéologique que cette économie de la « concurrence libre et non faussée », « gagner toujours plus en exploitant toujours plus n’importe où ! », le nec plus ultra de la pensée bruxelloise est la cause unique de cette déréliction sanitaire, si l’on ose cet emprunt littéraire ! Neuf mois avant la pandémie, Le Figaro qui ne passe pas pour un journal antilibéral, alertait sur les graves problèmes de pénurie de médicaments du fait des délocalisations, en indiquant que « 80 % des principes actifs sont fabriqués hors d’Europe, contre 20% il y a trente ans[9] ».
Effectivement comment évaluer le mérite des chercheurs, des enseignants, des soignants… Le nombre de publications ou de brevets est un bien piètre indice quantitatif qui favorise la bibliométrie et non la recherche et la qualité. Ces derniers mois nous l’ont amplement démontré par des publications erronées et non vérifiées. Bien plus, selon une enquête de Nature auprès de 4 300 chercheurs : « Avez-vous déjà ressenti la pression de vos pairs examinateurs pour citer des études apparemment superflues dans votre travail ? ». La réponse est « oui » pour 62 % d’entre eux[10]… Le paiement à l’acte à l’hôpital institué par la loi Bachelot (2009) comme ailleurs est une impasse et les innombrables réformes de notre système éducatif à chaque ministre, ne masquent même plus les mauvais résultats de notre pays, classé 23e sur les 79 évalués par l’OCDE en 2019 par le « Programme international pour le suivi des acquis des élèves » (PISA), même si l’on pourrait en dire bien des choses !
« Je ne sais ni lire, ni écrire » pourrait bien être les maîtres mots de nos modernes béotiens au pouvoir ! Ils ont découvert avec stupeur que nous n’avions plus ni producteurs de produits sanitaires, ni fabricants de médicaments, ni chercheurs pour inventer un vaccin alors que l’ARN messager est étudié depuis plus de quinze ans dans des laboratoires publics français soumis aux monstrueuses contraintes budgétaires qui privilégient l’immédiat à l’avenir comme l’expliquait récemment sur France Culture, Chantal Pichon[11]. Il est vrai que cette molécule a été découverte par deux Français, Jacques Monod et François Jacob, devenus Prix Nobel de Médecine. Nous étions en 1961, « l’âge d’or de la recherche en France[12] » où le Général de Gaulle souhaitait en la matière que « n’interviennent que ceux qui y comprennent quelque chose[13] ». On est bien loin des contrôles des boutiquiers, baptisés « évaluateurs », de la RGPP et de la MAP[14] qui lui a succédé sous le quinquennat suivant et qui précède le non moins pompeux « Programme Action publique 2022 », lancé en 2017… Avec 2,2% de PIB destiné à la Recherche, le pays de Pasteur comme on aime à le dire ces derniers temps, est bien pâlichon, comparé à ses voisins et concurrents ! « Apprenez de vos erreurs » était notre conclusion du dernier numéro de 2020 !
– Regards croisés sur l’échec et la défaillance en sept articles aussi variés que l’activité humaine.
– Indices boursiers, fraudes et résultats apportent un complément nécessaire car si l’on peut apprendre de son échec, encore faut-il accepter de se remettre en cause car « c’est en poussant tes pièces d’échecs dans le sérieux des conventions du jeu d’échecs, c’est en rougissant de colère si ton adversaire triche avec la règle, que tu prépares en toi l’illumination du vainqueur d’échecs[15] ».
6. Rapport public, La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) : un bilan pour de nouvelles perspectives, La Documentation française, 7 novembre 2011.
12. Pierre Lelong, « Le général de Gaulle et la recherche en France », in Dossier : « Le CNRS au temps de Charles de Gaulle 1958-1969 », La Revue pour l’Histoire du CNRS, 1999, https://doi.org/10.4000/histoire-cnrs.481.
13. Pierre Lelong, « L’action à l’égard de la recherche scientifique et technique » in Institut Charles de Gaulle, De Gaulle et le service de l’État, Plon, 1977.
14. Modernisation de l’action publique.
15. Antoine de Saint-Exupéry, Citadelle, 1944, p. 937.
L’assemblée générale du Spiil a élu un nouveau bureau le 24 mars 2021 pour accompagner les projets de développement du Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en Ligne, auquel LaRSG adhère.
Nouveau bureau du Spiil
Pour succéder à Jean-Christophe Boulanger, le bureau a créé en son sein une co-présidence paritaire assumée par Cécile Dubois et Laurent Mauriac.
Le nouveau bureau a adopté la répartition suivante des rôles : – Cécile Dubois, 94 Citoyens : co-présidente – Laurent Mauriac, Brief.me : co-président – Laurène Bounaud, Disclose : secrétaire générale – Pierre-Yves Platini, Mind média : trésorier – Augustin Naepels, Les Jours : vice-président chargé des affaires institutionnelles – Julien Vinzent, Marsactu : vice-président chargé des relations adhérents
Sont également élus au sein du bureau : – Stéphane Alliès, Médiapart : chargé de l’examen des candidatures au Spiil et futur suppléant à la CCIJP – Gabrielle Boeri-Charles, Binge Audio : représentante du Spiil auprès de la CPPAP et chargée de l’animation de la communauté podcasts – Maurice Botbol, Indigo publications : chargé des sujets institutionnels – Jean-Christophe Boulanger, Contexte : groupe de travail Europe et international – Pierre France, Rue89 Strasbourg : chargé du référencement des prestataires et relais des actions d’éducation aux médias – Isabelle Germain, les Nouvelles News : représentante à l’Afdas – Marie Hédin-Christophe, La Lettre du Musicien : chargée de sujets institutionnels – Alexis Nekrassov, Agence du Fil : coordinateur social, représentant à la CCIJP – Benjamin Sabbah, Worldcrunch : représentant auprès du FSDP – Jacques Trentesaux, Mediacités : chargé de l’organisation de la Journée de la presse indépendante – Béatrice Vannière, Têtu Ventures : chargée de la structuration de l’offre de services du syndicat et du recrutement d’adhérents.
Le nouveau bureau remercie Jean-Christophe Boulanger, président de 2015 à 2021, pour son investissement considérable qui a permis au Spiil de se développer fortement et de faire connaître ses combats.
Après plus de 11 ans d’existence, le Spiil connaît une attractivité et une influence croissantes. Le syndicat regroupe désormais 225 éditeurs de presse indépendants et près de 300 publications. Le Spiil est force de proposition dans le débat public pour défendre une conception vivante du pluralisme et l’indépendance de la presse, qu’il s’agisse du renforcement des critères de reconnaissance de la CPPAP, des droits voisins ou encore de la défense de la liberté de la presse dans le cadre des projets de loi confortant les principes de la République et sécurité globale.
Les nouveaux élus vont poursuivre la mise en œuvre du plan de développement ambitieux du syndicat pour les 10 prochaines années.
La stratégie du Spiil
Cette stratégie s’articule autour de trois axes : – Le renforcement de l’offre de services. – Les combats pour la défense de l’indépendance, de la transparence, de l’innovation et de l’équité entre les formes de presse, constitutifs de l’identité du Spiil. – L’élargissement de l’influence du syndicat à l’échelle européenne pour peser face aux plateformes.
Pour accompagner ce nouveau bureau, le Spiil pourra compter sur une équipe étoffée. Anne-Claire Marquet, directrice depuis novembre 2020, sera bientôt rejointe par Max Boire, chargé de mission relations adhérents.
Ce n’est pas sans trembler qu’après Cicéron, Sénèque, les Pères de l’Église, Montaigne, Rousseau, Voltaire, Chénier, Kant, Benjamin Franklin, et tant d’autres avant eux et depuis eux, que l’on pose en titre, ce merveilleux vers de Térence !
Depuis la scène romaine, où elle fut jouée, vers 163 avant Jésus-Christ jusqu’à nos jours, « puni par soi-même » ou « le bourreau de soi-même », cette comédie latine, inspirée du grec Ménandre[1] au titre imprononçable nous a également donné les si beaux vers de Baudelaire dans les Fleurs du Mal[2] !
On mesure alors combien nous sommes présomptueux, devant de tels devanciers de choisir d’introduire le numéro d’une revue de gestion par ce monument de la pensée mondiale.
Et pourtant, ce titre nous est venu tout simplement à la lecture des articles qui composent le sommaire de la dernière parution, datée de cette année si particulière qu’est l’année 2020.
Il est des années comme des personnes qu’on ne regrette pas et pourtant, elles n’en sont pas moins des jalons, des souvenirs, voire des marqueurs d’une évolution qui se fait, s’est faite ou se fera, avec ou sans notre accord.
Homo sum… L’humain : le meilleur atout du gouvernement des entreprises
Gouvernement des entreprises, c’est bien le titre que nous choisissons sciemment pour éviter celui de gouvernance qui marque le triomphe de la pensée économico-financière du capitalisme depuis le milieu des années 1970, notamment dans la lignée du néo-libéralisme qui sévit toujours et dont l’emploi doit rester cantonné à la finance. Avec la gouvernance, est apparu dans la Fonction publique et en France, le New Public Management qui vient de montrer ses limites, ses échecs et pour tout dire sa totale fausseté.
On ne peut raisonner plus mal que ces hauts ou moyens fonctionnaires qui ont collaboré à déshabiller les services publics et ont rendu exsangue celui qui est le plus nécessaire en cette pandémie, la santé et avec son corollaire, l’environnement !
Ces politiques publiques catastrophiques sont dues à ces demis-savants, qui ne sont plus de vrais serviteurs du bien commun mais sont en revanche bien une caricature des vrais entrepreneurs dont ils singent sans le comprendre souvent, le vocabulaire !
On peut leur imputer la honte de ce chômage de masse endémique, cette perte des repères pour des millions de familles jetées dans la pauvreté et souvent la désespérance sociale par l’application de cet inepte concept du « chômage naturel », inventé par Milton Friedman !
Comme ils ne sont plus administrateurs et qu’il ne sont pas non plus des hommes d’entreprise, même quand le goût du lucre les entraîne dans ce que l’on appelle le « pantouflage[3] », ces hauts fonctionnaires apportent les insuffisances de leur formation au secteur privé. Ils sont parfois à l’origine même de catastrophes dans les entreprises privées ou publiques qu’ils vont servir, voire s’y servir, ou diriger !
Tout cela vient d’exploser, et ce n’est pas en changeant de nom de l’école qui stigmatise pour l’ensemble de la population, les échecs des politiques menées depuis des années en matière, économique, financière et sociale que l’on va changer quoi que ce soit aux faits. Leur nocivité s’est révélée avec acuité depuis le début de la crise sanitaire. Les aveugles n’ont pas mieux vu depuis que, sous un président qui vient de nous quitter, ils sont devenus les « non-voyants », et les sots, même devenus « non-comprenants », n’en seront pas plus intelligents après qu’avant comme le rappelle la sagesse populaire.
Il faut penser autrement, mieux et de manière moins monopolistique en rejetant ce « main stream » néolibéral qui envahit tout notre vocabulaire, ne trouve-t’on pas désormais des clients à la CAF[4] ou à la Sécurité sociale, et on n’y supprime pas des emplois, on y rend des postes !
La cause de ces maux est la LOLF[5]. Depuis son adoption sous le Gouvernement Jospin en 2001, elle s’est appliquée à toute l’administration à partir de 2006. C’est l’alliance entre la droite giscardienne, représentée par le sénateur Alain Lambert et la gauche rocardo-strausskhanienne, du député Didier Migaud.
Cette réforme constitutionnelle, en abrogeant l’ordonnance du 2 janvier 1959, s’est incrustée depuis, au cœur de tout l’appareil d’État puis de la sécurité sociale.
Didier Migaud, président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale à partir de 2007, est nommé Président de la Cour des Comptes en 2010 et il ne quitte ses fonctions qu’en 2020 pour prendre en charge la Haute Autorité de la Transparence. Comme président de la Cour des Comptes, il est désormais chargé de valider les comptes de l’État et de faire des préconisations de gestion dans l’esprit de la LOLF.
Quand on sait que le quasi recrutement de cette Cour est dans la botte de l’ENA, on n’est pas étonné des approximations qu’elle émet en matière de management.
Laurent Fabius, président de l’Assemblée nationale au début du processus de la LOLF, est ministre des Finances lors de son adoption et est désormais depuis 2016, le Président du Conseil Constitutionnel qui examine toutes les lois budgétaires à l’aune de cette nouvelle conception de la gestion publique fondée sur la « performance » dans les budgets publics.
La révision générale des politiques publiques (RGPP) qui se veut « programme de modernisation de l’action de l’État touchant l’ensemble des politiques publiques et l’ensemble des ministères[6] » est le bras armé de la LOLF. Elle est mise en place par le Ministre Éric Woerth, actuel président de la Commission des finances de l’Assemblée. Si elle semble bienheureusement oubliée, du fait de sa parfaite inefficacité à restaurer les finances publiques, elle n’en a pas moins gravement obéré toutes les capacités de l’État, des collectivités publiques et des grands secteurs à partir de 2007.
René Rémond y aurait peut-être vu une sorte de coalition louisphilipparde entre orléanistes unissant un Thiers, pas encore massacreur au Guizot de « l’enrichissez-vous ! » sous les auspices du banquier Laffitte !
C’est au nom de ces « Rapports Annuels de Performance » (RAP) qu’on ferme des lits d’Hôpitaux, qu’on valorise la rémunération à l’acte dans la santé (la T2A) , qu’on regroupe des services dont on réduit les effectifs, qu’on désertifie les campagnes ou les banlieues des services publics, qu’on ne renouvelle pas les matériels de la police et de l’armée ou qu’on abandonne l’entretien de centaines de ponts, de routes mais aussi qu’on songe à privatiser les infrastructures comme on l’a fait pour les autoroutes et qu’on souhaite le faire pour les barrages. Cette idéologie mortifère s’épanouit dans des Projets Annuels de Performance (PAP). Même s’il estime que la baisse du nombre de lits n’induit pas nécessairement une dégradation de la prise en charge des patients, le président du SMPS (Syndicat des managers publics de santé), on appréciera le terme qui pastiche celui de l’entreprise, reconnaît malgré tout « que l’encombrement des services d’urgences, lié au manque de lits, se traduit par des complications de prise en charge[7]. Alors que dire de ces suppressions de lit, en pleine pandémie, par des ARS comme le relève notamment le très sérieux Quotidien du Médecin[8] ?
Cette idéologie transforme un commissariat de police en un centre de profit où la sécurité des citoyens n’est plus l’objectif mais où la remontée (le reporting) des indicateurs s’accompagne de la mise en place des outils de service de leur « performance financière[9]… ». L’hôpital devient une entreprise dont le sens n’est pas le soin mais le profit comme l’explique Jean de Kervasdoué, l’un des principaux thuriféraires de la mise en place de la T2A : « plus l’activité est soutenue, plus l’hôpital gagne de l’argent, exactement comme dans une entreprise[10] » !
Cette idéologie destructrice vient d’aboutir à ce qui n’a que l’apparence d’un contresens en terme de néolibéralisme et qui est l’endettement massif des États. Des centaines de milliards d’euros ne vont pas aller aux priorités criantes comme la santé, mais vers une partie seulement de l’économie. C’est une chance pour ce capitalisme de connivence, dont nous avons à plusieurs reprises dénoncé les effets délétères. La crise Covid constitue une opportunité que décrit très bien dans son dernier ouvrage, COVID-19 : La Grande Réinitialisation, le père du forum de Davos, Klaus Schwab !
C’est l’application, déjà vue lors de la crise financière de2009, de la privatisation des profits, mais de la mutualisation des pertes qui défavorise les petits, entreprises comme particuliers.
Ainsi, toutes les statistiques démontrent qu’à l’issue de cette année de crise, les plus riches le sont encore plus[11] !
Que le lecteur ne s’inquiète pas, il ne lit pas ici un brûlot révolutionnaire, mais simplement une analyse de gestionnaire qui s’inquiète des effets de cette tendance économique sur l’avenir. En 2017, déjà, le FMI qui ne passe pas pour une officine anticapitaliste, s’inquiétait du fait que « le creusement des inégalités met en danger une croissance économique durable.
De ce fait, la lutte contre les inégalités relève pleinement de la mission du FMI qui consiste à aider les pays à améliorer leurs résultats économiques[12] »
… Et humani nihil a me alienum puto !
Bien sûr, et on le regrettera, le tirage de notre revue ne lui permet pas de faire accroire qu’elle va changer la pensée économique toujours dominante. Bien sûr, notre revue n’a pas la force de ces télévisions en continu qui pour la plupart répandent cette idéologie mortelle véhiculée par des chroniqueurs stipendiés, experts souvent en rien. Le plus honteux exemple est à l’évidence la fondation IFRAP dont la directrice qui pérore sur tous les plateaux, n’a aucune formation économique et fonde son discours sur une totale absence de travaux de recherche… l’imposture par excellence ! Les maîtres ont toujours besoin de leur cohorte de laquais !
Il faut donc proposer autre chose et vite !
D’abord parce que nous rejetons comme le site du Ministère de l’économie ose le prétendre[13] que « le gouvernement d’entreprise…
répartit les droits et les obligations des différents intervenants au sein de l’entreprise, tels que les actionnaires ou les dirigeants, et pose les règles et les procédures de prise de décision. »
L’entreprise n’est pas réductible à une simple société de capitaux où seuls compteraient actionnaires et dirigeants, ces shareholders. Il est révélateur que cette conception étroite et passéiste de l’entreprise soit celle que l’on trouve encore en 2020 sur le site du Ministère de l’Économie français. Elle illustre ce que nous venons de décrire sur l’exceptionnelle méconnaissance de l’économie réelle des hauts fonctionnaires, allaités à la dérive néolibérale du «nouveau » management public durant leurs études à l’ENA comme à l’EHESP[14] ou à l’EN3S[15] pour ne citer que ces remarquables fleurons de la formation gangrénés par ce mal de la « performance » et de la rentabilité !
En ne considérant pas toutes les parties prenantes (les stakeholders) comme l’a notamment démontré dans notre revue Astrid Mullenbach[16], on mutile toute l’entreprise ! Celle-ci est aussi, – et il est important de le souligner – et peut-être d’abord composée de salariés qui ne sont pas pour rien dans l’enrichissement de cette dernière. Richesse de ce capital humain, et non coût ! En cette année 2020, qui ne doit pas nous faire oublier qu’elle était dédiée « au plus illustre des Français[17] », le Général de Gaulle, rappelons toute la modernité de sa pensée : « C’est en effet dans l’entreprise que les travailleurs, les capitalistes, les dirigeants, collaborent d’une manière pratique. » pour mettre en place ces « contrats de société, passés sur pied d’égalité entre les divers éléments, les engagements des uns vis-à-vis des autres, mais évidemment de types très divers, suivant la nature, la dimension des entreprises[18] »…ce qui implique la démocratie au sein des entreprises et la participation des salariés pas seulement aux gains, mais à son gouvernement.
Aussi à l’évidence, choisir d’ouvrir ce numéro par :
la « gouvernance » coopérative, condition du référentiel durable d’une organisation est un choix emblématique que nous assumons parfaitement ;
la confiance au secteur des sociétés de conseil est le thème suivant ;
le financement bancaire des PME est ensuite passé au crible des liens sociaux ;
l’intention environnementale des propriétaires-dirigeants des PME enfin, s’inscrit lui aussi dans notre logique éditoriale humaniste.
Le deuxième dossier qui s’intitule naturellement gouvernance, puisqu’il traite de finance, Gouvernance : normes et bonnes pratiques, s’insère dans notre souhait de demeurer dans une vision prospective propre à une situation de remise en cause des fondements existants.
Le risque dans les entreprises du CAC 40.
Le passage des états financiers de la norme comptable OHADA en norme IFRS à la Bourse des Valeurs mobilières.
Et puisque nous avons pris le parti de commencer en latin, terminons par cette injonction que Bossuet adressait en admonestation à Louis XIV et qui est tirée du psaume ii :
Et que nous traduirons librement :
« Et maintenant, vous les grands de ce monde, comprenez instruisez-vous, vous qui décidez du sort du monde ! (Et nunc, reges, intelligite, erudimini, qui judicatis terram !)
Apprenez enfin de vos erreurs !
* « Je suis un homme et je considère que rien de ce qui est humain ne m’est étranger », Térence (Heautontimoroumenos, ἑαυτὸν τιμωρούμενος I, 1, V, 77).
1. Ménandre (342-341 -291-292 av. J.-C.).
2. Baudelaire, Spleen et Idéal, Les Fleurs du Mal, 1857.
3. Terme emprunté à l’argot de Polytechnique, préférer la pantoufle, c’est-à-dire renoncer au service public, « la botte », pour désigner le passage dans les entreprises privées des hauts fonctionnaires !
4. CAF : Caisse d’allocations familiales.
5. La loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
14. École des Hautes Études en santé publique de Rennes qui forme l’essentiel des directeurs d’Hôpitaux.
15. École Nationale Supérieure de Sécurité Sociale, de Saint-Etienne qui forme les cadres dirigeants des organismes de sécurité sociale : URSSAF, CPAM, MSA, CAF…
16. Mullenbach Astrid, « L’apport de la théorie des parties prenantes à la modélisation de la responsabilité sociétale des entreprises », La Revue des Sciences de Gestion, 2007/1 (n° 223), p. 109-120. DOI : 10.3917/rsg.223.0109. URL : https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2007-1-page-109.htm
17. « Le premier des Français est désormais le premier en France », mot d’accueil du Président René Coty au Général de Gaulle à l’Élysée, lors de son installation comme premier Président de la Ve République, le 8 janvier 1959.
18. Charles de Gaulle, Discours au vélodrome de Paris, 14 décembre 1948.
Il n’est pas certain que ce retour-là, contrairement au retour de Michaël, tant attendu dans la chanson de la regrettée Rika Zaraï, nous incite à chanter « alléluia[1] » ! Ceux qui lisent nos éditoriaux depuis quelques années, savent que nous ne manquons jamais de mettre en parallèle, la logique qui inspirait les régimes de derrière le « rideau de fer » et celle qui porte le néolibéralisme, plus ou moins monétariste, qui prend son inspiration en Ayn Rand (1905-1982). Le même matérialisme fondateur, tient pour rien l’Homme et ses aspirations spirituelles !
Ces derniers temps, le scientisme dont nous évoquions le retour[2] a tendance à profiter de la crise pandémique pour s’épanouir dans la caste « Mba-isée » que fustigeait H. Mintzberg et qui tient les rênes des différents états. Il faut ne rien connaître à rien pour s’étonner ou s’émerveiller qu’ils appliquent, sauf très rares exceptions, les mêmes politiques autoritaires, inspirées par la peur et la certitude d’appartenir aux « élus » puisqu’ils sont formés sur ce même modèle désincarné ! Ils se sont adjoint, depuis la pandémie, une coterie de Diafoirus, plus ou moins galonnés, parfois au passé prestigieux, mais « la vieillesse est un naufrage[3] », disait déjà le Général ! Quelques carriéristes, et ce mot est aussi bien féminin que masculin, quelques chevaux de retour, quelques « utilités » du moins pour elles-mêmes, et l’on vous bâtit un « conseil scientifique » qui va à peu près, tout dire et son contraire, depuis mars 2020, avec la docte suffisance que garantit la méconnaissance des choses et des gens !
Lyssenko est bien de retour !
Car rappelons-le, le biologiste soviétique qui inspira les théories les plus absurdes ne détruisit pas seulement la génétique soviétique et celle des malheureux pays satellites, mais il fut considéré comme un maître par nombre de sommités scientifiques en Europe de l’Ouest et tout particulièrement en France[4] ! Notre malheureux pays est donc doté d’une prédisposition naturelle à considérer que l’idéologie est plus importante que les faits ! Imposer la science prolétarienne à la science bourgeoise, c’était une belle victoire y compris au CNRS dans les années 1950. La biologie « progressiste et matérialiste », pouvait enfin triompher de la « réactionnaire », idéaliste et mystique ! Car évidemment, s’il y a victoire, il y a donc vainqueurs et vaincus ! Depuis mars 2020, nous avons tous assisté à ces débats, ces combats, ces invectives, ces condamnations définitives voire ces mises-à-mort de celui qui ne pense pas comme la meute, de ceux que l’ « on » a appelés les « experts » ! Les populations ébahies, ont ainsi découvert que le monde de la science n’est pas un long fleuve tranquille, que les « médecins » dont ils pensaient que leur premier but était de les guérir ou du moins de les soigner, ne connaissant pas ce nouveau mal, prenaient des positions très personnelles, et pour le moins, dominantes et autoritaires voire pire sur les contemporains qui les écoutaient avec stupéfaction, étonnement ou effroi. Parfois, si l’on croit les vaticinations de ces nouvelles Pythies que sont ces instituts de sondage, c’est même la soumission qui a répondu : « Punissez-moi plus, et surtout punissez plus mon voisin indocile que je vous dénonce, pour que nous soyons sauvés de ce mal » ! Encore que l’on ne soit même pas sûr que c’est « nous », mais bien plutôt « je » sois sauvé, qu’il faudrait écrire tant « la vertu d’égoïsme[5] » ou « l’égoïsme rationnel » contre « l’altruisme », qui fonde la thèse néolibérale, a façonné les modes de comportements individualisés à l’extrême par la segmentation marketing qui nous a même valu le vainqueur de la dernière élection présidentielle française. Imposer à l’autre le silence est bien ce qui prévaut et a, prévalu depuis quelques mois. La nouveauté est que cela se passe c oram populo et non plus seulement dans le silence des « labos » et le secret des salles de conseil plus ou moins feutrées des universités et institutions de recherche, où le poignard dans le dos et l’ostracisme sont depuis longtemps un jeu quotidien entre « chers collègues » ! Pour corser le tout, et pour bien ressusciter les pratiques de Lyssenko, le pouvoir politique s’est bien engagé dans cette opération où le traditionnel « caviardage » de la presse, habituel en temps de guerre, est remplacé par un matraquage gouvernemental destiné à décrédibiliser toute voix discordante ! Qui n’a pas entendu, la Porte-parole du Gouvernement ou le ministre de la Santé, user de l’argument de l’autorité sanitaire pour fustiger les porteurs de masque, qui n’a pas entendu le Directeur Général de la santé déclarer devant le Sénat que le masque en extérieur ne sert à rien, n’a pas compris combien a été instrumentalisée la connaissance scientifique pour justifier des politiques insanes. Bien plus, à l’injure verbale contre tous ceux qui estimaient qu’il existe une autre voie, s’est doublée, non pas de la conduite au Goulag, mais de l’interdiction de prescrire voire d’exercer sa responsabilité hospitalière car les laquais administratifs sont souvent plus cruels que les maîtres. Jamais, on n’avait vu un ministre s’emparer d’un article qu’il n’avait certainement pas lu, pour ordonner au Haut Conseil en Santé publique de proposer « sous 48 heures une révision des règles dérogatoires de prescription » de divers traitements comme l’hydroxychloroquine quelqu’opinion qu’on puisse avoir sur l’efficacité de ce traitement[6] ! Faire taire un confrère plus brillant que soi en se fondant sur ce qui est apparu comme une farce scientifique, aurait dû conduire le même ministre et ses affidés à la démission honteuse, mais pas si l’on comprend ce qu’est l’esprit lyssenkiste qui prévaut désormais avec le scientisme ambiant dans notre pays qui n’a rien à envier aux tentatives d’encadrer la recherche médicale qu’on a vu se développer sous Trump. La même idéologie scientiste et répressive produit toujours les mêmes politiques qui imposent au nom d’idéologies politiques, économiques et parfois religieuses, un embrigadement de la recherche, une persécution des « dissidents » et au final une forme d’arriération mentale qui ne favorise ni l’innovation, ni la science, ni le progrès humain. « Le phénomène Lyssenko est un exemple extrême de la perversion de la science par l’idéologie, souvent avec l’assentiment de la communauté scientifique. Est-il aussi certain que ce type d’événement ne puisse arriver aujourd’hui ? » est la question que posait en 2005 Michel Garbarz[7]. À l’évidence, 2020 vient de lui apporter une réponse dans le champ d’expertise qui est le sien et qui gère désormais nos vies, et même parfois nos pensées : le secteur sanitaire !
La gestion sous influence des règles et normes sanitaires, voilà bien ce qui est nouveau et devrait susciter nombre de recherches. Pour le moment, nous marquons notre résistance à la pensée serve et affirmons notre conviction que la recherche doit être libre, en consacrant le dossier liminaire qui invite à « Repenser l’organisation » et en dédiant un cahier spécial à « l’entreprise libérée ».
Repenser l’organisation avant, deviendra plus qu’un objectif à l’issue de la Crise de la Covid-19. « Changement organisationnel innovant et institution publique » ouvre notre réflexion grâce à Laurie Marrauld, Claude Sicotte de l’EHESP et Stéphane Bourez de l’Institut Curie, et traite évidemment des systèmes de santé publique. La crownd delivery est un enjeu déterminant de l’organisation de ce dernier kilomètre avant le client final. Le confinement a rendu plus actuel encore de s’interroger sur la livraison. Cette innovation à développer, est traitée dans l’article qu’Oumalma Belhaj et Gille Paché consacrent à « une lecture collaborative de la logistique ». Repenser l’enseignement du management : 10 ans après sa publication, les Français vont-ils (enfin) lire le rapport Carnegie ? est la question que pose à juste titre Yoann Bazin aux institutions d’enseignement afin d’engager des réformes solides et d’avenir !
Remercions enfin, les professeurs Annabelle Jaouen et Sylvie Sammut de l’Université de Montpellier d’avoir animé et dirigé la publication du cahier sur « l’entreprise libérée » ! Comme elles, nous pensons que « l’adoption de l’entreprise libérée exige une transformation majeure des pratiques traditionnelles de l’entreprise » et qu’il nous faut trouver « comment l’on peut éveiller, dès les bancs de l’université ou des business schools, les futurs managers à devenir des leaders libérateurs ».
Voilà sans doute l’un des moyens d’éviter, du moins dans notre domaine, le retour de Lyssenko !
3. Charles de Gaulle (1890-1970), Mémoires de guerre , tome I, L’Appel , 1940-1942 (1954).
4. Walter Gratzer, The Lysenko affair : the eclipse of reason, Medecine sciences : M/S 21(2):203-6, march 2005,
5. The Virtue of Selfishness: A New Concept of Egoism, 19 essais de Ayn Rand et Nathanaël Branden, 1964.
6. Tweet d’Olivier Véran : « Suite à la publication dans The Lancet d’une étude alertant sur l’inefficacité et les risques de certains traitements du Covid-19 dont l’hydroxychloroquine, j’ai saisi le HCSP pour qu’il l’analyse et me propose sous 48 heures une révision des règles dérogatoires de prescription » 23 mai 2020.
7. L’affaire Lyssenko, une éclipse de la raison, traduit par Michel Garbarz, https://www.erudit.org/fr/revues/ms/2005-v21-n2-ms870/010555ar/
Telle est bien ce qui marque la gestion de la crise pandémique par les autorités de santé, y compris les médecins et chercheurs embarqués dans une spirale dirigiste qui méconnait les principes de la Santé selon la définition de l’OMS, notamment en France et par les grandes revues scientifiques dont The Lancet. Voilà pourquoi notre modeste revue entend s’intéresser à la Responsabilité dans ce numéro double de l’été 2020.
La responsabilité est d’abord, personnelle et donc incessible. Elle est le fruit même de la Liberté et du discernement à l’exercer qui va jusqu’au droit de « résister à l’oppression », le quatrième de nos droits naturels depuis 1789[1], c’est-à-dire de ne pas exécuter un ordre injuste et de s’opposer même à la loi… De ce droit personnel découle bien entendu celui de l’exercice du pouvoir. C’est cette thématique qui s’illustre dans un cahier central que le Professeur Medhi Nekhili et Eric Bidet de l’université du Mans ont intitulé : « Gouvernance responsable ». « Ce que nous apprend la finance », en deux articles achève et renforce notre réflexion entamée par le premier dossier consacré aux « Organisations responsables ». En cette période où la crise économique, découlant de la pandémie, sévit, qu’il me soit permis de citer juste le premier article « consacré aux accords de Ruptures Conventionnelles Collectives ». Il allie les sciences juridiques et de gestion. Il illustre notre souci constant de ne pas nous limiter à la « gestion gestionnaire », mais de la confronter, comme cela se fait dans les entreprises, aux réalités des circonstances. Notre riche et internationale équipe d’évaluateurs a seule permis cette complémentarité des disciplines qui nous rappelle combien notre revue est estimée par les décideurs eux-mêmes[2]. C’est finalement cette renommée-là qui nous importe et nous évite comme Cyrano « d’avoir son encensoir, toujours… »
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1. Article 2 de la Déclarations des Droits de l’Homme et du Citoyen, 26 août 1789
2. Etude FNEGE 2016 “L’impact de la recherche en management”
Merci à nos relecteurs, réviseurs et correcteurs ! ou Comment fonctionnons-nous
par Philippe Naszályi – Directeur de La RSG
La crise mondiale a frappé notre publication comme tout le reste de la presse ou de l’économie.
Certes beaucoup de relations se font par Internet et le confinement qui frappait nombre de nos collègues et confrères comme nous-mêmes, n’entravait pourtant pas les liaisons, objectera-t-on !
En effet, mais notre revue contre vents et marées depuis 1965,
pense que la recherche en gestion n’est pas le monopole des anglo-américains,
refuse les contributions, qu’acceptent pourtant des revues encore francophones et souvent mieux « rankées « que nous, qui ne sont que de mauvais « remakes » souvent mal traduits d’ailleurs de pensées américanisées,
favorise les jeunes auteurs et les auteurs aux cultures et pratiques différentes du « main stream », et de ce fait a permis de faire émerger nombre de respectables « professeurs »,
ne publie pas les articles d’un soir mais une réflexion rigoureuse et durable,
a tenu, durant cette crise à ne pas modifier sa rigueur unique et son fonctionnement international.
En effet, rappelons-le : toutes les propositions qui nous sont adressées, sont analysées par TROIS évaluateurs dont au moins, un n’est pas hexagonal.
Après les différents échanges entre auteur(s) et évaluateurs, le texte définitif est ensuite adressé à DEUX RELECTEURS pour :
la langue,
l’orthographe,
la vérification de toutes les sources et références bibliographiques contenues par chaque article.
Je mets au défi les évaluateurs, rankeurs, classeurs de revues de trouver une telle rigueur ailleurs !
En effet, ami lecteur, cadre d’entreprise, chercheur, universitaire, étudiant, nous pensons que « tu » mérites le mieux !
Permettez-moi alors tous simplement de dire merci à tous ceux qui interviennent aux différentes étapes de ce processus (souvent trouvé long par nos auteurs) qui aboutit à la publication d’un numéro de cette revue qui, depuis 1965, souhaite promouvoir recherche et pratiques dans toute ce qui est le champ des sciences de gestion en toute liberté et honnêteté intellectuelle !
L’incompétence est-elle seulement le fruit de l’idéologie ? Kakistocratie, cleptocratie et cacocratie
par Philippe Naszályi – Directeur de La RSG
Dans un article de 1953, Karl Loewenstein défendait la thèse que « toute idéologie doit pour se réaliser en tant qu’action politique et sociale, créer et utiliser des institutions et des techniques adaptées à ses principes[1]. Staline dirigeait alors l’empire soviétique et il faut bien reconnaître que l’idéologie était sans nul doute le fruit « des actions-non logiques », comme Pareto le prétendait.
L’apparente disparition, du moins en Europe, de la terreur qu’inspirait le communisme, a fait croire à nombre de nos contemporains que nous sortions de l’« âge idéologique » pour entrer dans un monde sans histoire où la rationalité du système de production capitaliste serait contrôlée par ce nouveau dieu qu’est le marché.
Il s’agit là d’une nouvelle croyance propagée par un cercle d’initiés, formés aux mêmes sources, et se prenant pour une élite mondialisée. Elle a pour fondement la croyance en « l’intérêt du consommateur » comme valeur suprême. Ni le travailleur, cher au modèle socialo-communiste, ni le pauvre, éminent parmi tous, dans la foi catholique, ni le citoyen, valeur suprême de la république, ne pouvaient désormais servir de référence à cette toute-puissance, au sens psychanalytique, qu’est l’acte d’acheter.
La sécularisation de l’Europe principalement, a favorisé la « réceptivité » de cette nouvelle religion qui, en conditionnant les masses, après avoir conquis les dirigeants, l’emporte désormais en vidant l’Occident de son passé religieux.
C’est justement parce que la religion ne va plus de soi que se dressent les conflits qu’on observe un peu partout, et en France un peu plus que partout. Même les entreprises y sont confrontées ! Notre revue dans son numéro précédent a traité fort justement de ce sujet grâce à deux articles de fond[2].
Ce n’est toutefois pas cet aspect que nous entendons ici, rapidement mettre en avant. C’est plutôt celui qui, a contrario du talent que requiert l’entrepreneur, place la caste politico-affairiste à la tête interchangeable des grands postes de gouvernement comme des grandes entreprises.
Le fait d’avoir fait croire à l’ensemble de la planète qu’une seule voix désormais menait le monde, est une idéologie qui génère tout autant de serviteurs zélés et incompétents que l’on trouvait jadis à la tête des organisations du Gosplan. Cette foi des croyants en absolu indiscutable et indépassable a été, nous l’avons dit maintes fois, théorisé si l’on ose accoler ce noble mot à cet « archevêque de la pensée unique[3] qu’est Alain Minc. Ce promoteur du « cercle de la raison » semble avoir triomphé. Depuis 2012, l’establishment de « gauche raisonnable et de droite raisonnable », pour reprendre ici, les propos de l’inénarrable, lecteur de « Zadig & Voltaire » qu’est l’ancien député et ancien ministre sarkozyste devenu macroniste, Fréderic Lefebvre, en est convaincu !
Cette bourde culturelle, peut-être malencontreuse, illustre pourtant bien ce qui nous semble être la véritable caractéristique de ces gens du « nouveau monde ». lls croient dur comme fer, qu’ils vont réformer, un verbe transitif qu’ils transforment en absolu, avec les recettes éculées du libéralisme des xviiie et xixe siècles, que leur ignorance du passé, leur fait prendre pour nouvelles. Le film de Terrence Malick, Le Nouveau Monde, sorti en 2006, contient déjà toute la désillusion de ce qui est alors une rencontre entre « la civilisation » et la nature. C’est le viol des sanctuaires, le vol du territoire et la destruction des pratiques qui concluent cette confrontation. Par-delà l’aspect symbolique, ce film se révèle prémonitoire de ce qui se vit aujourd’hui. Ce n’est bien sûr pas la représentation des Indiens de l’empire brisé de Powhatan en Amérique au moment de sa conquête par les Européens qui est en jeu désormais, mais la vieille Europe. C’est le retour d’une idéologie, dominante outre-Atlantique, assimilée comme credo, par notre caste inculte et prête à tout « larguer » pour apparaître, comme jadis le père du « libéralisme avancé »[4] : « moderne » !
Mais cette caste est aussi souvent, très étatique, ce qui n’est pas le moindre de ses paradoxes. Le financier Charles Gave qui préside aux destinées de « l’Institut des Libertés » qu’il a créé dénonce cette palinodie. Plus sérieusement, Sebastián Pérez Sepúlveda défend l’idée que le niveau de précarité du travail ainsi que son invisibilité comme objet de la critique collective, au Chili, premier pays à avoir appliqué sous Pinochet, les effets du monétarisme friedmanien par l’action des « Chicago boys », correspondent à un désarmement radical des sens normatifs associés au travail [5]. C’est ce à quoi nous avons assisté ces dernières années lors des coups de boutoir donnés contre la protection sociale et le Code du travail. C’est ce à quoi nous avons assisté par les débuts de l’étatisation de la sécurité sociale lors des ordonnances Juppé de 1995. Son successeur idéologique à Matignon s’emploie à soviétiser le chômage (ASSEDIC) et les retraites avec la même volonté destructrice du vieux monde que ses devanciers bolcheviques, tant leur conception du néo-libéralisme marie si bien Lénine et Elstine : violences et accaparement !
Les effets, comme au Chili d’ailleurs, sont favorables aux Grandes firmes et n’apportent à peu près aucun avantage au véritable tissu économique et de l’emploi que constituent les PME et TPE qui assurent 95% des embauches.
C’est ce que l’on pourrait appeler la « cleptocratie » où, le copinage de formation et l’interchangeabilité des carrières, font qu’en gouvernant, on favorise, par le vol des deniers publics, les entreprises des copains de promotion, allés « pantoufler », et qui se montreront accueillants, lors des changements de pouvoir. Il est intéressant de voir que la Cour des comptes, constate qu’en 2018, un tiers seulement des élèves sortant de Polytechnique, choisissent la fonction d’État, alors qu’ils ont été rémunérés pendant toutes leurs études par ce même État ! Petite cleptocratie… encore que, ce sont bien les mêmes qui dirigeront nos grands Corps d’État et les grandes entreprises : Certains, comme Erwan Le Noan, parlent alors de relations incestueuses et de « capitalisme de copinage »[6] !
Mais cette cleptocratie qui n’a pas empêché, un Richelieu ou un Mazarin d’être de très grands ministres pour la France, se double désormais du règne des médiocres : la Kakistocratie est une nuance certaine de la cacocratie (Kakocratie), ce cinquième système socio-technico-économique qu’André Maïsseu voit se développer sous nos yeux. Il y voit la confiscation des pouvoirs du peuple par les représentants de la démocratie représentative voulue par Siéyès, ce gouvernement des plus mauvais au détriment de la démocratie directe telle qu’appliquée en Suisse[7] !
La kakistocratie correspond bien à ce que nous constatons, du moins en France. La caste dirigeante formée pour l’essentiel dans les mêmes écoles, dites « Grandes », est bien une sorte d’aristocratie inversée. L’ampleur du phénomène touche toutes les grandes administrations de l’État comme des régions ou des départements. Brigue, ou pour le dire plus communément, copinage, préside aux nominations. Point n’est besoin de connaître le système de santé, pour se trouver à la tête de la plus grande agence de santé du pays, tout comme il n’est pas nécessaire d’avoir jamais enseigné pour se trouver, grâce à un corps électoral irrégulièrement constitué, élu président d’une université. De toutes manières, les juges administratifs qui auraient à examiner la chose, sont issus des mêmes origines endogamiques et font carrière dans les mêmes réseaux !
Ce n’est pas pour rien que de petits chefs d’entreprise se sont retrouvés aux côtés d’authentiques ouvriers, de chômeurs en fin de droit ou de retraités appauvris à partir de novembre 2018, sur des ronds-points, avec des gilets jaunes. Cette désespérance d’une partie des populations résulte directement de ce mirage qu’est cette religion de la consommation qui s’enfonce dans une financiarisation incontrôlable des rapports économiques et sociaux. Cette absence de repère se double des scandales connus, et parfois supposés, d’une caste dirigeante qui oscille entre la cleptocratie et la kakistocratie. Cette idéologie néolibérale a vidé le débat démocratique et intellectuel de tout contenu au nom de la vérité indépassable du « main stream » qui refuse toute alternative. Cette « seule voie possible » crée elle-même les angoisses et les rejets dès que le déclassement économique et social, du fait des inégalités croissantes, montre aux populations l’inanité de son efficacité et de ses promesses d’une consommation sans fin !
Loin de cette « société des individus »[8] au narcissisme mortifère, s’il faut vraiment parler d’une seule voie possible, retenons celle que Kofin Annam proposait au monde, celle « qui offre quelque espoir d’un avenir meilleur pour toute l’humanité est celle de la coopération et du partenariat, où toutes les forces sociales – les États, le secteur privé, les institutions de savoir et de recherche, et la société civile sous toutes ses formes – conjuguent leurs efforts en vue d’atteindre des objectifs concrets et réalisables. »[9]
On pourra objecter que l’on est loin des problèmes qu’une revue de gestion doit traiter et à coup sûr, on aura tort. Comme Térence, nous faisons nôtre cette sentence qu’étant hommes, « rien de ce qui est humain ne nous est étranger ! » et que c’est l’oubli de cette vérité qui est la cause de bien des problèmes économiques et sociaux qui concernent au premier chef les gestionnaires.
C’est dans cet esprit qu’a été organisé ce numéro autour de ces quatre dossiers :
L’entrepreneur, un métier ou des pratiques ?
Le changement : un moyen de survie ?
La RSE et l’Éthique !
Digitalisation : clef de la performance ?
[1] Les systèmes, les idéologies, les institutions politiques et le problème de leur diffusion. Revue française de science politique Année 1953 3-4 pp. 677-698
[2] Olivier Guillet et Martine Brasseur, « Le comportement des managers face au fait religieux. Apports de la théorie du comportement planifié », pp11-18, La Revue des Sciences de Gestion, n°297, mai-août 2019, Hugo Gaillard et Thierry Jolivet, « L’entreprise émancipatrice. Dépasser la « régulation » du fait religieux au travail par le disputatio, » pp. 89-102, La Revue des Sciences de Gestion, n°297, mai-août 2019
[4] Valéry Giscard d’Estaing, président de la République de 1974 à 1981
[5] Pérez Sepúlveda, S. (2019) « La précarité du travail à l’ère du néo-libéralisme avancé », Emulations – Revue de sciences sociales, 0 (28), p. 63-77. doi : 10.14428/emulations.028.05.
[6] Erwan Le Noan, « Mettre fin aux relations incestueuses entre Medef et Etat », l’Opinion, 1er juillet 2008.
[7] André Maîsseu, (2019), De la féodalité à la cacocratie – Tome 1 : Le Paradigme Médiéval, les éditions Persée, 574 pages.
[8] Norbert Elias (1991), La Société des individus, Fayard, 301 pages[9] Kofi Annan, Discours à l’Assemblée générale de l’ONU, 24 septembre 2001.
Depuis 2005, grâce à Yves Soulabail, notre société d’édition avait mis en place un site que connaissent tous ceux pour qui la recherche et les informations en sciences de gestion veut dire quelque chose dans l’espace académique et des entreprises francophone.
Notre
rédaction a décidé en juin de passer une étape et de faire de ce site une
publication à part entière aux côtés de la revue papier qui elle, existe depuis
1965, 54 ans.
En
France, pour bénéficier du régime de la presse, il faut que la CPPAP, une
instance composée à parité de représentants de l’administration de l’État et de
professionnels de la presse, reconnaisse au demandeur « la qualité la
qualité de service de presse en ligne (SPEL) »[1].
Appuyés
sur les conseils de notre Fédération de presse (FNPS) nous avons déposé un
dossier et La RSG.fr a été agréé le 4
juillet 2019…
Comme « on n’est jamais si bien servi que par soi-même », selon la formule célèbre de la pièce « Bruis et Palaprat » de Charles-Guillaume Etienne[2], il nous semble important de présenter rapidement LaRSG.fr, car cette reconnaissance ne constitue que les prémisses d’un projet éditorial d’une plus grande envergure et sur lequel désormais nous travaillons. Nous y associerons toutes les bonnes volontés.
LaRSG.fr est née de cette
idée de partir d’une revue académique et internationalement reconnue de
recherche, pour présenter une information destinée à un public plus diversifié
et plus vaste. En effet, on le voit tous les jours « Tout se gère »[3].
C’est cette réalité profonde et ancienne qui a constitué l’idée que,
par-delà les limites socio-culturelles et sémantiques, le terme
« gestion », concerne bien toutes les actions de l’information dans
une société économique développée. On gère certes les entreprises, mais aussi
les associations, les administrations, les collectivités territoriales et même
l’Etat (et souvent très mal d’ailleurs) … On voit fleurir partout des masters
de gestion des activités sportives, des activités culturelles, de la santé …
En en mot, la gestion concerne bien la politique, la société en général.
On fait de la gestion comme M. Jourdain faisait de la prose.
LaRSG.fr, est déjà un site qui totalise 2 369 textes en accès gratuit, ainsi que deux années d’articles téléchargeables de la revue, bien entendu payants et sous format PDF, en dehors des éditoriaux de la publication qui sont en accès libre.
LaRSG.fr à la mesure des
moyens qui sont les siens souhaite étendre son rôle pour devenir une, voire la
passerelle c’est-à-dire ce passage entre un monde de la gestion (enseignement
comme entrepreneurial) et des activités dans toutes les domaines :
diffuser de manière large dans tous les champs de la société pour informer et
distraire, mais aussi pour contribuer à faire prendre en compte des réalités et
forger un esprit critique et citoyen sur des problèmes généralement laissés aux
spécialistes ou ignorés du plus grand nombre.
Une source
d’innovations pour que la pensée francophone de management !
C’est ce vaste chantier qui va occuper la rédaction élargie durant les mois qui viennent. Il fait de notre revue qui est déjà pratiquement la seule à être une publication répondant aux normes et aux exigences de la presse, une source d’innovations pour que la pensée francophone de management ne soit pas enfermée dans les combines de copinages que sont les pseudo classements qui ont paru eux-aussi cet été. On reviendra dans un numéro prochain sur celui de Shanghai.
Depuis des années, ces manœuvres lilliputiennes, « je crée une « association de recherche », qui imprime une revue et je deviens de cette sorte membre d’un comité Théodule qui attribue un classement aux revues » sont la pratique du classement des revues de gestion en France. C’est la magnifique ritournelle enfantine, « je te tiens, tu me tiens par la barbichette ».
Notre revue n’appartient pas à ce petit cénacle de l’entre soi et ne
grouillotte donc pas pour s’y faire reconnaître.
Elle avance des arguments sérieux : une triple évaluation des
articles, puis s’ils sont acceptés une double relecture pour vérifier toutes
les sources bibliographiques. Aucune autre revue n’a ce degré de qualité. Notre
revue est reconnue par la Commission paritaire des publications, aucune des
autres revues ne l’est. Est-il utile de conclure sur ces classements et leur
légitimité ?
Déjà pratiqué par nombre de « comités de sélection », ces pratiques incestueuses ont été dénoncée par nombre d’entre nous sans que la puissance publique qui pourtant sait mettre en place des instances de régulation à la hauteur, la CPPAP que nous citions plus haut en est un exemple, ne s’en émeuvent.
C’est sans doute que dans l’esprit d’une partie de la caste aux affaires,
la publication en français n’est pas digne d’intérêt.
Contre cette nouvelle « trahison des clercs », nous prétendons que penser et publier dans la 3e langue la plus parlée au monde, n’est en rien dépassé.
Robert Aron, journaliste et chercheur, disait qu’ « il n’y aura jamais de repos sur la terre pour les hommes de bonne volonté ![4] »
La Revue des Sciences de Gestion, membre du SPIIL, adhère totalement au communiqué que vient de diffuser le Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en Ligne. C’est un fait que les récentes déclarations de deux membres du gouvernement, la ministre de la Justice Nicole Belloubet et le secrétaire d’État chargé du numérique Cédric O, alimentent de dangereuses confusions dans un débat public, par ailleurs légitime, sur la propagation de propos haineux, la diffusion massive de fausses nouvelles, les opérations d’influences étrangères destinées à peser sur des résultats électoraux, et l’un des fondements de la démocratie, à savoir la liberté de la presse.
Pour éviter les amalgames
Tous ces sujets sont certes liés au numérique, mais chacun d’eux relève de
logiques différentes, et mérite des réponses spécifiques. Le Syndicat de la
presse indépendante d’information en ligne (Spiil) estime que les amalgames
entretenus par le gouvernement montrent une méconnaissance grave des problèmes
soulevés, ce qui risque d’engendrer des évolutions législatives qui, in fine,
iront à l’encontre des principes démocratiques prétendument défendus.
Préservons la loi de 1881 sur la liberté de la presse
En associant étroitement l’injure et la diffamation dans son projet de réforme de la loi 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (Le Journal du Dimanche du 15 juin), la ministre de la Justice mélange deux concepts juridiques bien distincts. La diffamation s’appuie sur des données factuelles, alors que l’injure ne renferme l’imputation d’aucun fait.
Plus grave : dans la réalité numérique actuelle, l’injure et les
propos haineux sont essentiellement diffusés sur les réseaux sociaux, et dans
la très grande majorité des cas, de manière anonyme. Donc en toute impunité. La
diffamation, en revanche, est typiquement un délit de presse, intervenant dans
un cadre réglementé. Chaque organe de presse est légalement tenu de publier des
“mentions légales” comprenant une adresse physique, un hébergeur et un
directeur de publication qui est juridiquement responsable de toutes les
informations publiées sur son site.
De fait, les journaux sont très exceptionnellement condamnés pour injure,
mais peuvent l’être pour diffamation. En mettant en avant les propos injurieux
pour mieux faire sortir la diffamation du cadre de la loi de 1881, afin de
l’intégrer au droit commun, Mme Belloubet porte gravement atteinte au droit de
la presse, fondement de notre démocratie depuis… 138 ans.
Contre un Conseil de l’ordre des journalistes
En préconisant la création d’un Conseil de l’ordre des journalistes qui serait chargé de recommander au gouvernement de l’interdiction de tel ou tel organe de presse (Reuters du 25 juin), M. Cédric O s’engage sur une pente encore plus dangereuse. Le fait qu’il ait fait machine arrière le 27 juin sur France Culture en affirmant que ses propos n’engageaient que lui et non le gouvernement, ne change rien au fait qu’il s’agit bien de la position d’un ministre en exercice.
Cedric O ignore notamment qu’une instance officielle, la Commission
paritaires des publications et agences de presse (CPPAP), composée à égalité de
membres de l’administration et de représentants des organisations
professionnelles d’éditeurs, est chargée depuis 1945 d’attribuer l’agrément
“presse” aux publications qui répondent à un nombre de critères très
précis.
Il ignore également que l’ancien patron de l’AFP, Emmanuel Hoog, a remis au
gouvernement, au mois de mars, un rapport préconisant la création d’un Conseil
de déontologie des médias, qui serait une instance d’autorégulation de la
profession, de facto une autorité morale sans aucun pouvoir de coercition. À
l’opposé d’un Ordre qui, comme pour les avocats et les médecins, dispose d’un
pouvoir de sanction.
Un tel niveau d’ignorance se double d’un raisonnement confus et dangereux
préconisant de faire des journalistes des auxiliaires de police du
gouvernement, en leur demandant de dénoncer les médias qui “fragilisent la
démocratie”, un concept pour le moins fourre-tout.
Pour une régulation des plateformes
Pour défendre sa position, Cédric O donne comme exemple le fait que les
chaînes russes RT et Sputnik sont mieux référencées sur YouTube que BFM ou
CNews. Et il estime que c’est aux journalistes d’y mettre fin ! Dans un
bel aveu d’impuissance, le secrétaire d’État chargé du numérique oublie avec
légèreté que YouTube n’est pas un organe de presse et que la régulation des
grandes plateformes relève de sa compétence.
Cédric O ne devrait donc pas se réfugier derrière la responsabilité des journalistes, mais s’interroger sur les meilleurs moyens d’obtenir de ces plateformes véhiculant haine, propagande, et injures, qu’elles assurent une certaine transparence quant à leurs algorithmes ainsi qu’une plus grande responsabilité juridique des contenus qu’elles diffusent.
Le Spiil ne conteste pas la nécessité d’un débat sur la nécessaire adaptation de la loi de 1881 à l’ère numérique, sur la création éventuelle d’un Conseil de déontologie de la presse, et sur l’obligation de réguler des plateformes dont la puissance de diffusion fait qu’elles devraient assumer une responsabilité juridique sur leurs contenus.
C’est pourquoi le Spiil fera prochainement des propositions concrètes. Il
apportera ses connaissances et son expertise de dix ans de défense de la
déontologie de la presse numérique à un débat complexe, soulevant des questions
inédites, mais qui ne peuvent souffrir d’approximations, de propos simplistes
ou encore d’injonctions contradictoires.
Il fallait s’y attendre, mais est réapparu
dans les bagages des idées néolibérales, habitées toujours au fond par le mythe
de l”homo economicus,
le scientisme et sa volonté de tout expliquer par une raison qui n’a que de très
loin rapport avec une méthodologie cartésienne bien comprise.
Ad veritatem per scientiam, lisait-on au fronton de l’observatoire de Camille Flammarion, il y a deux siècles. Être moderne désormais, du moins en France, consiste donc à ressasser les idées développées par quelques physiocrates de la deuxième moitié du XVIIIe siècle et quelques rationalistes du siècle suivant !
Les attendus et
arguments qui justifient les récentes ordonnances réformant le droit du travail
en France, sont à peu de chose près les mêmes que ceux de l’Édit de Turgot de
février 1776 puisque comme de nos jours, les « codes sont obscurs » ! À
l’instar de nos juges prud’homaux, les jurés d’alors ont besoin d’être encadrés
pour éviter que des sommes importantes soient dilapidées dans des procès (sic).
Bien entendu la
liberté de circulation de la main-d’œuvre est une bonne chose et il ne faut pas
craindre « que l’affluence subite d’une multitude d’ouvriers nouveaux ruine les
anciens, et occasionne au commerce une secousse dangereuse ». L’accueil des
travailleurs anglais, non pas chassés par le Brexit, mais alors par
l’Indépendance des colonies américaines, est une opportunité du moment qui
justifie des mesures particulières… « S’il y a un moment où l’on puisse espérer
d’attirer en France beaucoup d’ouvriers anglais, et avec eux une multitude de
procédés utiles inconnus dans nos fabriques, c’est celui-ci ! ».
L’innovation n’est
pas non plus en reste dans cet argumentaire contre l’organisation du travail
qu’on veut disqualifier car il existe des « difficultés multipliées que
rencontrent les inventeurs auxquels différentes communautés disputent le droit
d’exécuter des découvertes qu’elles n’ont point faites ». Même aussi et déjà,
sont remises en cause certaines formations professionnelles jugées inutiles, en
2016 c’était notamment celles des coiffeurs[1], car
« fermant la porte à tout ouvrier qui n’a pas passé par de longues épreuves, et
en général aux étrangers » écrit Turgot. Quant à Madame de La Fayette, elle n’a
qu’à bien se tenir[2] !
On pourrait s’en
arrêter là, dans ce rapide et instructif comparatif entre les textes dits
modernes et leurs devanciers d’il y a trois siècles que l’on vient de citer. Ce
serait oublier cette croyance, cette conviction même et affirmée en la
régulation optimale par le marché : « dans les lieux où le commerce est le plus
libre, le nombre des marchands et des ouvriers de tout genre est toujours
limité et nécessairement proportionné au besoin, c’est-à-dire à la
consommation ».
L’étude de
l’actualité est devenue un bain de jouvence pour un « moderniste » voire pour
un « contemporanéiste » au sens des historiens français, et qui les change de
l’habituelle référence aux années 1930, toujours largement exploitées par une
caste politique qui ignore généralement ce qui s’est passé avant. Les imbéciles
et les ignares croient toujours que leurs idées sont neuves et qu’ils sont des
innovateurs ! Les plus cyniques exploitent la méconnaissance générale et la crédulité
publique grâce à la complicité des médiocrates que l’information en continu
devenue un produit à vendre et donc une communication, a érigé en arbitre d’un
prêt à penser réduit aux émotions et aux lynchages.
À ce plagiat des
idées libérales initiées notamment par un Clicquot de Blervache dont le mémoire
sur les « obstacles que les
corps de métiers apportent au travail et à l’industrie, avait été
primé par l’Académie d’Amiens », (l’histoire offre quelques clins d”œil) en
1757, ce que l’on nomme néolibéralisme de nos jours, s’ajoute naturellement car
ils sont fils d’une même pensée, cet autre sophisme qu’est le « scientisme » !
Même si l’école autrichienne en économie a essayé de faire passer cette
doctrine pour celle du clan haï des « planificateurs » ou « collectivistes »,
il faut bien constater, tout en restant le plus impartial qui soit, que les
justifications « scientistes » se trouvent le plus souvent dans ceux qui
apportent de l’eau au moulin des produits les moins défendables des firmes
industrielles ! Car c’est effectivement dans le domaine de la santé que cette
alliance contre nature fleurit le plus et depuis bien longtemps. Les comités
Théodule dits de déontologie sont aussi myopes que des taupes (celui de
l’administration française semble vouloir s’illustrer par son aveuglement) et
sauf très rares exceptions, les déclarations obligatoires de liens d’intérêts
sont autant d’inutiles prétextes à une bonne conscience pharisaïque.
Mais les scientistes
en santé, ne sont pas seulement des affidés plus ou moins stipendiés des grands
groupes ou leurs dévots soumis par une mauvaise compréhension du « doute
méthodique », ils professent en outre « qu’en dehors de la connaissance
scientifique, aucune autre forme de connaissance n’est légitime[3] ».
L‘on est confondu devant tant de suffisance et de prétention alors que le
cerveau humain est encore si vaste à explorer, les interactions entre molécules
si inconnues qu’elles permettent une crise sanitaire comme celle du Levothyrox[4], que
les pratiques médicales des autres civilisations échappent pour beaucoup à nos
perceptions comme celles des médecines « dites alternatives » dont fait partie
l’homéopathie…
L’appel des 124
« médecins et professionnels de santé[5] »
contre les médecines alternatives, appelées « fake médecines » vaut son pesant
de suffisance, de vision limitée à un scientisme qui exclut toute ouverture à
des pistes à venir et des découvertes dans des champs jusqu’ici inconnus. Ce
relent de « vraie foi », qui en fait de véritables émules de Torquemada, nous
rappelle avec sourire que le Dr Georges Clemenceau, fier de son titre de
médecin, fut avec nombre de professionnels de santé, y compris de l’Académie de
Médecine, un virulent propagandiste de la « théorie de la génération
spontanée » contre la « découverte » des microbes de Pasteur, à qui on
reprochait de n’être même pas médecin ! Contre ces nouveaux inquisiteurs
agissant au nom des vérités qu’il faudrait démontrer avec une seule méthode,
c’est un rejet de tout découverte hors du connu.
Devant les plaies,
Saint Thomas a cru, mais un scientiste ne l’aurait pas fait car son présupposé
l’aurait empêché de faire même le constat puisqu’il va contre la vérité
scientifique du moment !
On est affligé devant
tant de suffisance qui démontre tant de vacuité et qui empêche en fait
l’expérimentation, le doute et la marche en avant. « Nous n’avons pas le droit
d’avoir un désir, quand la raison parle ; nous devons écouter, rien de plus ;
prêts à nous laisser traîner pieds et poings liés où les meilleurs arguments
nous entraînent » disait déjà Renan[6].
Ce n’est évidemment
pas cette religion de substitution qui rend serf que nous avons voulu
développer dans ce numéro en plaçant l’Intelligence comme principe,
l’« intelligence des choses » est bien autre et bien plus riche que ces
quelques 124 Diafoirus devenus Trissotin et il y a fort à parier que quelque
ministre ou Haute Autorité ne serve de Vadius !
Ce qui est indémontré
avec nos modestes connaissances du moment ne peut être voué aux gémonies par
quelque pédant ou quelque ayatollah !
C’est donc avec cette approche ouverte sur la multiplicité que nous continuerons à rejeter cette science-là en ne séparant pas ce qui la connaissance du laboratoire et celle du terrain ce que dénonce comme nous, Boris Cyrulnik car « Il n’y a pas d’intelligence froide. Il n’y a d’intelligence qui si elle est éveillée. Pour cela, il faut qu’il y ait des émotions et une relation ».
C’est ce que les deux dossiers de ce numéro présentent :
– « Intelligence
et perceptions » entend intégrer différentes approches fondées sur la
diversité des points de vue pour pouvoir appréhender cette part essentielle
dans les organisations que sont :
– « Investissements
et gouvernance », un lien ténu, lui-aussi circonstanciel du fait des
différentes cultures entrepreneuriales dans le temps et dans l’espace.
« Je crois que 2 et 2
sont 4 et 4 et 4 sont 8 » répond Don Juan à Sganarelle[7] qui
demandait à son maître à quoi il croyait.
Eh bien, en ce qui
nous concerne et parce que pour paraphraser Térence tout ce qui est humain ne
nous est pas étranger, et est aussi sciences de gestion, nous pensons aussi que
1 et 1 sont parfois 3 et que 2 et 2 sont parfois 5, et que tout cela est Intelligere : comprendre, penser, réfléchir, estimer, évaluer, percevoir… en
fait tout sauf rejeter l’altérité !
Et nunc, reges, intelligite, erudimini, qui judicatis terram[8] !
[8]. « Et maintenant,
rois de la terre, instruisez-vous, vous qui décidez du
sort du monde ! » Psaumes, 2, 10, cité par Bossuet dans son oraison funèbre
d’Henriette-Marie de France, reine d’Angleterre, 16 novembre 1669.
L’affaire
des « gilets jaunes » qui fleurit
en France depuis
la mi-novembre et semble
vouloir durer au moins jusqu’à
la fin de ce l’on appelle
le « Grand Débat », pose à l’évidence,
même si les élus poussent des cris d’orfraie, le principe de la
représentation, de sa légitimité, de sa durée et de ce fait de sa révocabilité.
Des tombereaux d’injures
et d’invectives se déversent de part et d’autre et n’enrichissent pas
le débat qui repose sur les questionnements de marketeurs aux ficelles trop grosses pour ne pas être vues même des plus partisans favorables !
« Plus c’est
gros, mieux ça passe
» du langage populaire qu’avait
repris Jacques Chirac est avec la poursuite de la « politique du pire
» une des réponses classiques. En effet, la poursuite
de la confrontation violente pour retrouver le soutien de ce que l’on peut
appeler la « petite bourgeoisie pusillanime » a souvent été utilisée en histoire, lorsque
se pose un problème
de légitimité du pouvoir.
L’histoire
du XVIIIe siècle nous rapporte que déjà en 1757,
Simon Clicquot de Blervache, avait remporté le prix de l’Académie
d’Amiens (ça ne s’invente pas !), en fustigeant les « obstacles que les corps de métiers apportent au travail et à l’industrie ». On récompensait déjà les auteurs « libéraux » appelés alors physiocrates dans la lignée
de Gournay et Turgot… qui écrivait
que « Les hommes sont puissamment intéressés au bien que vous
voulez leur procurer, laissez-les faire, voilà le grand, l’unique principe »!
Devant la crise qui montait avec le déficit
du pays, on envisagea tout, des «assemblées de notables » d’abord, en 1786-87 qui firent remonter certes des préoccupations, mais perdirent toute autorité
car engluées dans leurs divergences et le maintien de leur « autorité ». Les Parlements, alors hautes assemblées de justice, comme le sont
notre conseil constitutionnel ou notre
Conseil d’État, apparurent vite comme les défenseurs de leur caste
et perdirent leur influence… Il ne resta
plus
que les états-généraux avec la suite qu’on
connaît. L’histoire
ne se reproduit jamais à l’identique, mais les problèmes de légitimité de la représentation sont toujours les
plus graves et ne
se résolvent que par une action en profondeur.
C’est pour cela que ce 1er numéro de 2019, entièrement dédié au Marketing, s’ouvre par un dossier consacré aux innovations en marketing : « Un nouveau Business Model pour réussir la transition énergétique : quels impacts sur les relations producteur/ client ? » est d’une actualité brûlante, mais il se veut comme tous les articles choisis par les évaluateurs et la rédaction comme porteur de « durabilité » par une redéfinition de la relation producteur-client comme une combinaison de ressources à susciter et organiser et sur l’introduction de la notion de service orienté résultat nécessitant de revoir le jeu des parties prenantes en y introduisant tous les acteurs institutionnels et territoriaux de l’efficacité énergétique. Le e-marketing dans les associations et la prise en compte du rôle des femmes dans les conseils d’administration sont deux aspects développés chacun dans un article permettent d’introduire les représentations dans le marketing : le rôle de la mémoire des enfants dans le prix, l’image du point de vente, la personnalité de la marque, et l’uniformisation des services télécoms sont autant de points saillants qui permettent tout en nous situant dans une actualité brûlante d’apporter une méthodologie et des réponses adaptées et éclairantes dans un univers en recherche. C’est dans cet esprit que vient opportunément la chronique bibliographique : L’économie comportementale : entre faiblesses méthodologiques et idéologie que Bruno Tinel, fait à partir de l’ouvrage, paru aux éditions Charles Léopold Meyer de Jean-Michel Servet : L’économie comportementale en question !
Il est toujours
utile de confronter les idées et de ne pas se contenter
des apparences simplificatrices !
Une idée neuve, comme le bonheur, selon la formule de Saint-Just, remis au goût du jour par quelque révolutionnaire d’antichambre, telle est aussi, comme on l’a vu dans le précédent numéro, le
MANAGEMENT.
Il nous a donc paru cohérent
pour terminer l’année
2018, d’en explorer deux autres aspects afin de rester dans une démarche propédeutique.
Rappelons que pour l’essentiel des TPE et PME, le management
reste une idée vague, mal comprise et parfois rejetée comme propre
aux « gros » ou aux « grands » !
Telle n’est pas notre
conviction et les articles que nous proposons à la lecture,
permettent une grille
de lecture éclairante
et adaptable à toutes les organisations, petites
et grandes.
Le premier dossier : Contrôle et droit des entreprises, rappelle que le droit
n’est pas autre chose qu’un
élément de gestion de l’entreprise, même
si dans de nombreux enseignements de gestion, on l’oublie…Le droit
n’est pas que l’affaire
du spécialiste, et nombre d’entrepreneurs l’apprennent souvent
trop tard. Ivan Tchotourian et Jérôme Turcotte, de l’Université de Laval au Canada, en
décrivant « Le droit des sociétés au
service d’une gouvernance d’entreprise sociétalement responsable », ne décrivent pas seulement des sociétés et un droit qui nous seraient étrangers, ils démontrent que tout cela est le fruit d’une idéologie « qu’il convient
de remettre en cause
pour que les entreprises de demain soient
vectrices de progrès économiques, environnementaux et sociétaux. » Voilà
bien un apport concret
à un Débat national, aux questions biaisées
de mauvais marketeurs, qui oublient, mais savent-ils réellement ce qu’est le management, les
vraies questions fondées sur de
vraies compétences. Emmanuel Bayo, l’un des
meilleurs connaisseurs français du droit des coopératives, souvent
de petites et moyennes tailles, indique que celles-ci semblent mieux résister
aux défaillances que les sociétés
financières, pourtant seul
modèle de Bruxelles et de ses sectateurs les
plus zélés. Y aurait-il des solutions de pérennité des PME qui seraient
plus profitables à l’économie que celles
des adorateurs du « veau
d’or » du courant dominant ? Une jeune
chercheuse, enfin, a le courage, en s’appuyant sur la littérature et des entretiens avec des professionnels du secteur agroalimentaire, de proposer des solutions pour une gestion
durable de la chaîne logistique. Au moment où les scandales du lait, de la viande
de cheval, et bien d’autres cachés ou à venir,
viennent démontrer les limites de la
régulation par le marché, pourtant seule solution
vantée comme la panacée par des
candides et sans doute beaucoup de pervers
!
« Réflexions sur la prise de décision » en découle
logiquement. Le management a bien pour fonction de « faire avancer dans une direction
précise ». Que la planification puisse être une échelle de mesure avec
son apport multidimensionnel, ou que l’africanité
puisse avoir une incidence sur la prise en compte de la RSE dans la performance
globale, posent des modèles et
tentent d’apporter des « boîtes à outils », au manager. Deux chercheurs de
cette nouvelle Lotharingie souhaitée par Charles le Téméraire (Université de
Franche-Comté et de Université de Bourgogne), démontrent le rôle de l’attractivité affective du pays d’origine dans la démarche d’achat et ouvrent ainsi
des pistes au marketing international ! L’histoire et les rêves territoriaux ne sont donc pas vains
! Les deux derniers articles du dossier[1], ont été sélectionnés
lors de la 9è édition de l’International Finance
Conference qui s’est tenue à l’ISC Business
School[2] que nous présentions dans le numéro précédent, se sont parfaitement insérés. Le premier, par une étude de cas, nous apporte une vision un peu moins officielle sur l’indépendance et la
compétence des comités d’audit de nombreuses d’entreprises françaises. Le second analyse le dispositif de Bâle 2
concernant la détermination du capital réglementaire des banques. Tous
ces éléments qui importent
à la prise de décisionhttps://thema.u-cergy.fr/IMG/pdf/lfc9_official_program.pdf.